S'évader, cela fait aussi du bien." Visiblement, dans ce spot, on a plutôt choisi de se placer du côté de l'évasion que de celui de l'info.
Et si, pour une fois, on ne gardait pas juste pour soi les observations, les analyses, les études, les recherches, les commentaires… qu'on ne cesse de faire à titre académique, professionnel ou purement personnel ?
Regard médias
29 janvier 2022
So Soir croit le Sénat belge tout puissant
S'évader, cela fait aussi du bien." Visiblement, dans ce spot, on a plutôt choisi de se placer du côté de l'évasion que de celui de l'info.
25 janvier 2022
Le putsch au Burkina à la télé : quel super show !
Cinq minutes. Le show annonçant la fin du régime Kaboré sur la RTB (cela ne s'invente pas) n'aura duré qu'un douzième d'heure. Mais il n'aura pu que marquer ceux qui l'auront vu, tant il a bien été mis en scène.
Par son cadre, tout d'abord. Il n'y a pas eu ici de saisie d'antenne brusque, ou de coup de force non contrôlé. La prise de parole des militaires s'est déroulée… dans le contexte d'une émission d'informations. Leur apparition à l'antenne a en effet été précédée… du générique prévu par le journal télévisé local pour ses éditions spéciales.
Un générique qui évoque directement le début des Jt de la station, d'où proviennent les principes de cet indicatif (univers, terre, listage des rubriques…, le tout tournant en permanence).
Dans ce contexte, le message adressé au spectateur est clair : il va assister à une édition spéciale de son Jt, comme il en aura sans doute vu (1) lors du 11 novembre 2001, du récent drame d'Inata (Sahel) où 53 gendarmes furent massacrés par des terroristes, ou au moment des dramatiques inondations qui touchèrent le pays en 2020.
UN FOND D'INFO
Mais voilà. À la fin du générique, pas d'apparition de journaliste présentatrice (ou présentateur) du Jt. Un groupe de personnages occupe l'écran, et n'a pas l'air d'appartenir à la rédaction de la chaîne de télévision. Pourtant, nous sommes bien au Jt. La preuve : ces individus occupent bien le studio du journal télévisé propre. Entre la scénographie classique du journal télévisé du Burkina et ce que l'on voit alors, rien n'a été modifié.
Oui, mais ce n'est pas tout. Comme dans toute station de télévision qui se respecte, une partie du studio du Jt de la RTB est virtuel. Et un grand écran occupe le fond du décor, derrière la présentatrice. À l'instar du paysage parisien que l'on voit tous les sur France 2 ou TF1 (ou sur La Une), au Burkina, c'est une artère animée de Ouagadougou, menant vraisemblablement au Monument des Héros, qui occupe le fond de l'écran. Lors de l'intervention des militaires, l'arrière-plan de l'image n'est pas celles des rues de Ouaga, mais la reproduction du dernier plan du générique, c'est-à-dire la mention "édition spéciale", sur fond du drapeau national. De quoi rappeler en permanence qu'on est bien dans l'actu.
La présence d'un tel élément de décor lors de l'apparition de putschistes à l'antenne n'est pas le fruit du hasard. En dehors du Jt (2), le fond de ce studio est un écran noir. L'image animée pour accompagner l'intervention des militaires a volontairement été choisie, et techniquement insérée dans le système du studio pour apparaître à l'antenne. Elle laisse croire que ce qui se passe là est bien de l'information, et que celle-ci revêt une importance nationale.
COMME UN TABLEAU
La disposition à l'image des représentants des corps d'armée n'est pas, elle non plus, fortuite. Mais le fruit d'un agencement esthétique qui inscrit de manière très particulière les militaires debout derrière ceux qui sont assis à la table. Les plus petits ont été placés sur les côtés, et les plus grands au centre (ou sur des praticables). De plus, le militaire planté au centre du groupe porte un casque surmonté d'une pointe, ce qui le fait dominer tous les autres, et le rend particulièrement impressionnant. Un peintre classique n'aurait pas conçu plus bel agencement.
L'éclairage du studio, lui aussi, n'est pas celui fourni par les néons qui doivent éclairer cette pièce quand on n'y tourne pas. Au contraire, ce travail de lumières est très pensé. En plan d'ensemble, l'image baigne plutôt dans la pénombre, alors que le bas de l'écran (les 3 bureaux) reflète la couleur rosée émanant du sol (lors des Jt, c'est du bleu). À l'arrière-plan, l'essentiel du groupe debout apparaît dans l'ombre, comme une masse compacte. Seul se distingue le milieu de l'image, particulièrement éclairé, tant à l'arrière qu'au premier plan. Au centre du tableau, un militaire assis bénéficie d'une belle lumière. C'est celui qui prendra la parole. Mais l'éclairage sort aussi de l'ombre le personnage au casque pointu de l'arrière-plan. L'image joue ainsi avec une belle subtilité entre le clair et l'obscur. Une composition qui ne s'est pas mise en place toute seule.
AXE Y-Y
Certes, l'intervenant se trouvait-il sans doute aussi à l'époque dans le studio du Jt, et bénéficiait-il d'un fond d'image non neutre. Mais l'action paraissait alors moins posée qu'en 2022. Le personnage, seul à l'image, semblait revenir d'opérations. Il paraissait plutôt terrorisé par la caméra, ce qui n'est pas le cas cette fois-ci. Il n'y a pas eu alors de travail de mise en image du personnage. Il a 'simplement' utilisé le média comme mode de transmission d'une communication. En 2020, par contre, il y a une vraie volonté de présenter un produit répondant aux conventions de l'audiovisuel, non seulement aux Burkinabés mais aussi au monde entier.
(1) Les sujets évoqués ici sont supposés avoir fait l'objet d'éditions spéciales du Jt burkinabé. Nos archives ne nous ont pas permis d'en certifier l'existence.
(2) Ou d'autres programmes tournés dans le même studio.
23 janvier 2022
"Face au Juge" (RTL-TVI): Pourquoi ça marche?
En janvier-février, les dimanches soirs en début de soirée, Face au Juge cartonne toujours sur RTL-TVI. Cela sera sans doute encore le cas cette année. Mais pourquoi donc cette émission-là dépasse-t-elle en audience toutes les autres? Quelle est sa recette? Et cela est-il prêt à durer?
526.645 téléspectateurs. Tel est le résultat d'audience (J+1) du premier Face au Juge de cette saison. Un résultat en dessous des scores réalisés l'an dernier, année Covid, mais aussi en 2019 (le programme avait alors débuté fin février). Le docu-réalité judiciaire de RTL-TVI a donc perdu des plumes à l'occasion de son premier numéro. Peut-être fera-t-il mieux par la suite (comme en 2019), mais ce résultat en baisse peut aussi être un indicateur de l'usure de la formule, ce qui serait assez normal vu le nombre d'années que ce programme existe.
EN TÊTE DE COURSE
Toutefois, même si son auditoire est en baisse, l'émission était toujours le 16 janvier dernier en tête des audiences, juste derrière le RTL Infos de 19h. L'an dernier, Face au Juge avait 4 fois occupé la première place des audiences journalières en Belgique francophone, et 2 fois la deuxième place. Un véritable record puisque, à part lors d'événements sportifs en direct, les Jt sont quasiment toujours en tête de ce type de classement en Fédération Wallonie-Bruxelles. Pour Face au Juge, ce résultat n'est pas neuf, comme s'il était inhérent au programme. Est-ce une question de format, de casting ou de programmation?
EFFET DE GRILLE
Sans mettre en cause les qualités de la réalisation, on doit constater que ses bons résultats sont d'abord justifiés par son positionnement dans la grille de RTL-TVI. La plage de début de soirée qui suit le Jt de la chaîne privée capte toujours beaucoup d'audience, par effet d'entraînement d'après-Jt, et en raison de la longueur du JT qui empêche, en lecture linéaire, d'enchaîner 'normalement' sur un autre programme, par exemple le 19h30 de La Une, après les infos sur RTL.
De plus, traditionnellement, le dimanche soir s'avère être un des moments de la semaine où la télévision réunit le plus grand nombre de téléspectateurs. Face au Juge bénéficie de cette circonstance, de sa place après le RTL Info 19h, mais aussi de la présence, après le magazine, d'un programme de soirée particulièrement porteur. Début 2021, c'est en primetime du dimanche que la chaîne a diffusé Mariés au premier regard (suivi en 2e volet, de Mon admirateur secret).
Le même phénomène a touché, en 2021, l'autre série de docu-réalité En route avec la police locale, elle aussi diffusée en début d'année le dimanche à la suite des infos. Elle a, à chaque fois, figuré dans le top des audiences de la chaîne (Jt exclus).
PROXIMITÉ MAXIMALE
Le concept de l'émission contribue évidemment aussi à son succès. Appliquant à la lettre le vieux slogan RTL C'est vous, l'émission repose sur un effet miroir porté presque à son paroxysme. On sait, depuis les travaux de la sociologue Dominique Mehl, qu'une des recettes appliquées par la télévision post-moderne est d'avoir abandonné "la fenêtre" pour "le miroir" (1). Face au Juge reproduit la formule à merveille, et de manière plus complète que d'autres émissions qui paraissent encore mieux correspondre à ce créneau (2). Elle fait rentrer le téléspectateur-type de la station au cœur du programme comme s'il en était l'acteur. Les contrevenants suivis dans l'émission pourraient être chacun d'entre eux. Ils sont issus des zones géographiques où l'on peut estimer que la chaîne compte le plus de téléspectateurs. Et les affaires montrées, justice de paix, tribunal tribunal correctionnel ou de police, constituent les niveaux de justice que n'importe quel citoyen peut rencontrer. Et ce principe est peut-être encore davantage applicable à l'audience de RTL-TVI, qui ne présente pas tout à fait le même profil sociodémographique que celui de Arte ou de La Trois, par exemple. Violences familiales, conflits de voisinage et entre propriétaires et locataires, rébellion vis-des forces de l'ordre, infractions au code de la route passant devant la Cour… dans Face au Juge, on y est. "Ça pourrait être moi." "Mais alors, comment on fait?" Chaque contrevenant devient une sorte d'exemple pour le spectateur, c'est-à-dire une espèce de héros particulier. Mais chaque juge suivi n'est pas en reste. Le tout donne en quelque sorte à l'audience un mode d'emploi de la Justice, avec un côté bon enfant.
DES ACTEURS REMARQUABLES
Le dernier composant de la recette Face au Juge, mais le premier en ordre d'importance, sont en effet les juges qui gèrent les dossiers. Sans eux, pas de programme, parce que pas de spectacle Ils ne font qu'appliquer la loi? Pas vraiment. Comme ils sont là pour juger, ils apprécient chaque situation, chaque contexte, et nuancent leurs jugements en fonction de nombreux critères qui empêchent le couperet de la Justice de tomber d'un coup ou de trop assommer le justiciable. Ce sont les juges qui sont bon enfant, et en ce sens qui brisent les représentations stéréotypées qu'a le public d'un Palais de Justice terrifiant, ou de juges intraitables et inaccessibles. En guise d'opération de relations publiques pour le monde judiciaire, cette diffusion annuelle en plusieurs épisodes vaut plus, et a davantage d'impact, que n'importe quelle campagne de communication coûteuse, confiée à de subtiles offices privées.
Ces juges sont des acteurs. Pour la plupart, ils se sont bâti un personnage que la vedettisation télévisuelle n'a fait que renforcer, voire exacerber. Parfois jusqu'à la caricature. Le plus remarquable de ces acteurs est évidemment celui du Tribunal de Première instance de Bruxelles, qui est devenu un véritable personnage médiatique. La série va en tout cas devoir s'en séparer, puisqu'il a quitté ses fonctions fin janvier 2021…
REALITÉ-TELÉ?
Tout ceci porte évidemment à s'interroger sur le statut de l'émission. Est-ce du reality-show, du docu-réalité, du docu-drama (docu-fiction) ou… du journalisme? La présence ponctuelles de courtes interviews des juges pourrait tendre à cette dernière option, de même que l'étrange affirmation faite dans l'intro de chaque émission ("C'est toujours un plaisir de vous dévoiler les coulisses de la Justice)". Mais celles-ci ne sont-elles pas un peu des prétextes, le poids des images captées constituant, en définitive, l'essence de l'émission? Ici, c'est la réalité que l'on veut montrer. Une fois les personnages (tant juges que prévenus) bien choisis, il suffit de laisser tourner les caméras, puis d'agir au montage pour construire le récit en séquences alternées, avec une voix-off journalistique peu présente, qui se contente en général raccourcit les péripéties inutiles ou résume les situations.
Comme toujours en télé, la réalité montrée est ici une certaine réalité. Et comme souvent dans ce type de programme, une réalité traitée avec peu de distance… même si on ne jurerait pas de la même manière des séquences de Strip-tease ou des films de feu Manu Bonmariage, par exemple.
Quoiqu'il en soit, Face au Juge est le fruit d'une bonne recette de télé populaire. Mais qui dépend de la qualité des acteurs, de leur permanence, et de la diversité des vécus montrés. Ce que le public commence peut-être à moins ressentir…
Frédéric ANTOINE.
(1) MEHL Dominique, La fenêtre et le miroir, Paris, Payot, 1992.
(2) On pense ici à Vu à la Télé, version belge du programme britannique Gogglebox, lui aussi diffusé le dimanche en début de soirée sur RTL-TVI, qui ne réussit pas à atteindre les audiences de Face au Juge alors qu'il est l'application pure de principe de la télé-miroir puisqu'il prétend montrer au téléspectateur ce qui se passe dans les foyers le soir lorsque la famille ou les couples sont devant le petit écran.
18 janvier 2022
Europe 1: autopsie d'un début d'agonie
Les auditeurs continuent à fuir la radio 'périphérique' française Europe 1. Sa reprise par Bolloré n'a rien amélioré. Que du contraire. À l'heure de la complémentarité des médias, la station est-elle vouée à disparaître, en se transformant en version audio de CNews ? La radio en ersatz de la télé, ça peut-il faire une bonne recette ?
Il est loin le temps où Europe 1 (ex-Europe n°1) caracolait en tête des audiences aux côtés de RTL et de France Inter Paris. Dans le dernier relevé de Médiamétrie (qui se base sur du déclaratif d'écoute "veille"), la radio dont l'émetteur historique se trouvait en Sarre se retrouve loin derrière les autres grands réseaux "généralistes", publics ou privés.
La comparaison de l'auditoire des deux stations par rapport à leur nombre d'auditeurs de 2015 confirme qu'Europe 1 perd, depuis lors, davantage d'auditeurs que la radio publique n'en gagne. Mais on ne peut s'empêcher de penser qu'il pourrait s'être passé depuis cette année pivot un phénomène de vases communicants, une partie du public d'Europe 1 la délaissant au profit de France Inter. Et non de RTL. Sans doute existe-t-il des données plus précises que celles à notre disposition pour confirmer ou infirmer cette hypothèse, mais celle-ci nous semble plausible. Plutôt urbain et proche des CSP+, l'auditeur d'Europe 1 recherche du contenu, et notamment de type 'enrichissement des connaissances'. France Inter et Europe 1 ont depuis de nombreuses années essayé de viser ce type d'audience, l'une plutôt par le haut, l'autre davantage dans une approche plus légère, allant à certains moments jusqu'à de l'infotainment (ce qui n'a pas nécessairement aidé la station).
06 janvier 2022
La RTBF pour tout le monde, c'est bientôt fini ?
La RTBF pourrait arrêter la diffusion hertzienne de ses chaînes tv à la fin de cette décennie. Devoir s'abonner pour pouvoir capter des contenus, est-ce compatible avec le statut d'un opérateur public ? Peut-on être obligé de payer pour recevoir un service que l'on finance en grande partie avec ses impôts ?
Selon un article paru ce 5 janvier dans la revue Broadband tv news (1), la RTBF entend "switch off its digital terrestrial broadcasts by the end of the decade", un projet qui est "part of a new strategic plan adopted by the RTBF Board of Directors". On savait déjà que, pour l'opérateur public, la fin de la radio analogique était programmée dans le courant de cette décade (reste à voir si le DAB+ finira un jour par vraiment séduire l'audience…). Mais, en tout cas à notre connaissance, il n'était pas encore établi que le service public comptait aussi éteindre tous ses émetteurs de TNT.
NI RIVALITÉ, NI EXCLUSION
Si tel est le cas, cela pose un sérieux problème par rapport à l'identité de ce qu'est un service public audiovisuel. Celui-ci est en effet supposé offrir à tout le monde un accès égalitaire, c'est-à-dire gratuit, à ses programmes. C'est ce qui caractérise le statut de "bien public" que la fameuse matrice de Paul Samuelson (2) définit comme non rival et non exclusif. La consommation de ce bien par une personne n'empêche pas d'autres de le consommer (contrairement aux biens privés), et tout le monde doit y avoir accès, sans barrière à l'entrée, c'est-à-dire sans devoir payer.
Même si la réception hertzienne de la télévision est très minoritaire dans notre pays, en coupant ses émetteurs, la RTBF annihilerait le statut d'égalité entre tous les citoyens.
L'article 3 de son statut (3) définit la mission de service public comme étant "assurée en priorité par une offre au public, notamment à l'ensemble des francophones de Belgique, de programmes de radio et de télévision, par voie hertzienne, par câble, par satellite ou tout autre moyen technique similaire qui permet d'assurer l'accès, à des conditions respectant le principe d'égalité entre les usagers, à tous les programmes généraux et spécifiques de l'entreprise correspondant à sa mission de service public".
Ce texte nomme explicitement la transmission hertzienne, tout en parlant aussi de câble et de satellite, mais pour autant que ces moyens permettent "d'assurer l'accès, à des conditions respectant le principe d'égalité entre les usagers".
ZÉRO TICKET D'ENTRÉE
Les ondes allant où bon leur semble, la diffusion hertzienne permet une réception partout, à tout moment, et directe. C'est-à-dire sans devoir pour cela s'acquitter d'un quelconque payement, qui fait passer le bien dans le domaine de l'exclusion. Sans réception hertzienne, l'accès aux contenus est conditionné au recours à un gatekeeper, de type privé, que celui-ci soit un opérateur du câble ou un fournisseur d'accès à l'internet. L'un et l'autre transforment le bien public en bien privé, puisqu'ils imposent à l'usager le paiement d'un abonnement pour avoir accès à l'ensemble des services qu'ils proposent. Puis, éventuellement, un second paiement, pour atteindre un service en particulier ou pour avoir accès à un contenu spécifique en particulier.
Or, on ne doit pas être obligé de payer pour recevoir un service que l'on finance en grande partie avec ses impôts.
Faire dépendre la transmission des contenus d'un opérateur public d'acteurs privés ne correspond pas non plus à ce que l'on peut attendre d'un agent public. Que ce soit sur le plan de la logique politique et sociale, mais aussi sur celui de la sécurité. Le jour où une panne, un sabotage ou un acte révolutionnaire mettrait les câbles hors service, par quel biais s'exprimerait alors la télévision publique? Aucun.
Il n'aurait plus de moyen d'entrer en contact avec ses usagers.
Si demain survient un accident nucléaire, un tsunami, un tremblement de terre ou toute autre catastrophe et que les Belges allument leur téléviseur afin de s'informer auprès de l'opérateur public, que verront-ils? Rien. Parce que câble sera muet. Et il en sera de même de l'internet. Inutile de se fier à son modem. Seuls subsisteront les messages hertziens, diffusés par des émetteurs qui sont conçus pour continuer leur mission en cas de panne du réseau électrique. Tout comme l'opérateur public, qui a le moyen de produire des contenus en toutes circonstances. Alors qu'aucune obligation de continuité de service n'est imposée aux entreprises privées de télécommunications, qui seraient bien en mal de l'assurer.
UNE ANORMALITÉ
La proportion de téléviseurs reliés à une antenne est faible ? Certes. Mais, par leur simple câble, certains téléviseurs actuels permettent déjà une réception directe de signaux télévisuels émis en numérique. Et pour tous les autres, il suffit de brancher un petit fil à la sortie coaxiale. Et hop, miracle, en passant en réception hertzienne, on captera une image.
Certes, en cas de crise, on se repliera sans doute aussi sur la radio, à condition de disposer de récepteurs DAB+ (sinon, tant pis pour vous. Vous mourrez devant votre transistor FM dans les émanations toxiques, sans avoir pu savoir comment faire pour y échapper). Mais on aura besoin de la tv pour concrétiser les informations, pour l'illustrer, l'humaniser.
Certes, la plupart des gens s'acquittent d'un abonnement pour leur smartphone, pour l'internet, la télé, le téléphone. C'est presque devenu "normal" de payer pour disposer de ces services. Mais, pour les médias publics, cela reste une simple possibilité parmi d'autres. Et non une normalité.
L'ARGENT vs RAISON D'ÉTAT
Alors oui, en Flandre, depuis le 1er décembre 2018, on est déjà dans cette configuration incroyable (4). Et la VRT s'est payée le luxe de dire à ses téléspectateurs qu'il y avait "des alternatives" à la réception hertzienne pour continuer à voir ses programmes. Des alternatives, oui. Mais qui ne sont pas de même nature que le produit d'origine. Quant à la justification de cet abandon, elle était essentiellement financière (5) : en Flandre, il n'y aurait "que" 45.000 foyers qui utiliseraient la réception hertzienne. Ce qui reste à démontrer sur le terrain, car ces cas ne sont pas vraiment identifiables, tant ils peuvent être diversifiés. Et cela et n'augure en rien les situations futures.
Bien sûr, posséder et gérer des émetteurs coûte cher. Si cher que, en Flandre, la VRT avait déjà en 2008 vendu son parc d'émetteurs à Norkring, avant de céder sa diffusion en DAB+ au hollandais Broadcast Partners. Il est évidemment tentant de justifier le futur switch off dans le sud du pays par les mêmes arguments que dans le nord. Se libérer de la charge des émetteurs permet d'investir dans le futur de la télé…
Mais, au niveau des pouvoirs publics, peut-on accepter de laisser tomber cette composante essentielle de la mission de service public, pour de simples raisons économiques? La raison d'État, elle, imposerait de la maintenir. Par nature. Par principe. Et par précaution.
Frédéric ANTOINE.
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(1) https://www.broadbandtvnews.com/2022/01/05/rtbf-wants-to-switch-off-fm-and-dvb-t/
(2) SAMUELSON P., “ The Pure Theory of Public Expenditure ”, in The Review of Economics and Statistics, Vol. 36, No. 4. (Nov., 1954), pp. 387-389.
(3) https://ds1.static.rtbf.be/article/pdf/2018-11-09-decret-portant-statut-de-la-rtbf-coordination-officieuse-de-justel-1548073211.pdf
(4) https://www.vrt.be/nl/aanbod/kijk-en-luister/radio-luisteren/dvbt/
(5) "We begrijpen bij de VRT dat een deel van de DVB-T kijkers op zoek moet naar een alternatief. Als openbare omroep moeten we keuzes maken en onze middelen als een goede huisvader beheren. Daarom kiezen we ervoor om te investeren in een toekomstgerichte technologie, zoals internet, waarmee we ons aanbod voor zo veel mogelijk mensen beschikbaar maken. De DVB-T kijkers zullen we op weg helpen naar het alternatief." (https://www.vrt.be/nl/over-de-vrt/nieuws/2018/10/31/vrt-stopt-op-1-december-met-haar-dvb-t-signaal/)
04 janvier 2022
Noël, Nouvel An: les audiences tv n'étaient pas de la fête
Bêtisier sur bêtisier : depuis quelques années, il n'y a que cela qui marche, les soirs de réveillon et les jours de fête, à la télé.
Les chaînes font rarement des records d'audience les jours de fête de fin d'année. Cette fois-ci, les programmes qui ont rassemblé plus de 300.000 téléspectateurs n'étaient pas légion… et pas plus originaux que d'habitude. Comme tous les jours de l'année, ce sont les JT qui se sont offert la meilleure part de la bûche, et celle de RTL a, ainsi qu'à l'ordinaire, été plus appréciée que celle du service public. Et ce y compris lors du service du midi, le 31 décembre.
INFIDÈLES AU POSTE
Bon, des audiences de 300.000 personnes, c'est tout de même pas la gloire. Mais cette année on a un peu dû s'en contenter, car le spectateur n'a pas tellement été très fidèle au(x) poste(s). Ce n'était pas le cas par le passé. Si l'on considère les audiences > 500.000 spectateurs (et non 300.000) lors des soirées de réveillon et des jours de fête entre 2018 et aujourd'hui, on ne comptabilise que 3 programmes diffusés en 2021, contre 5 en 2018, aucun en 2019 et 7 en 2020. Cette année-là fut exceptionnelle puisque frappée par le covid. Les restrictions qui y étaient imposées s'apparentaient à un réel confinement. Et donc à une surconsommation de la mère nourricière "télévision".
SEASON'S GREETINGS
(1) Le JT de RTL TVI du jour de l'An 2020 avait frôlé les 500.000 spectateurs.
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