Le message supposé rassurant envoyé hier mardi à son personnel par le CEO de RTL Belgique, affirmant que les informations circulant sur l'avenir de l'entreprise n'étaient que des spéculations, n'a évidemment convaincu personne. Il semble bien acquis que Bertelsmann entend à l'avenir limiter le RTL Group à son pré carré, c'est-à-dire à l'Allemagne. Une déclaration du CEO du groupe, citée dans L'Echo (1), est à ce propos plus que indicative : "Nous voulons être un consolidateur en Allemagne". Et elle rejoint à demi-mots ce que le patron de RTL Belgique écrivait lui-même hier, reconnaissant que le dossier de L'Écho "confirme néanmoins le thème développé depuis plusieurs mois par le CEO de RTL Group, Thomas Rabe, à savoir « Face à l’évolution de l’industrie audiovisuelle dans le monde, le groupe RTL, dans les différents marchés dans lesquels il est présent, investiguera les possibilités de consolidation de ses activités, qui peuvent se présenter sous différentes formes.»"
NATIONAL PLUTÔT QU'EUROPÉEN
Jusqu'à présent, le RTL group avait toujours misé sur une stratégie de développement international de ses activités, celle-ci reposant essentiellement sur un pôle "diffusion de programmes" caractérisé par une implantation nationale forte (2). C'est par la création de filiales nationales, souvent leaders sur leur marché, que le groupe est devenu incontournable à l'échelon européen. Les derniers choix de son management marquent un revirement à 180° de ce type de développement. L'heure semble désormais être au "repli stratégique" sur le territoire allemand, afin d'y bâtir un empire tellement fort qu'il soit capable de rivaliser, à l'échelon d'un pays, avec les opérateurs mondiaux et les plateformes multinationales. Avec une idée claire: être si fort chez soi qu'on parvienne ainsi à bouter hors du territoire ces acteurs internationaux qui s'y sont implantés au détriment des locaux. Jouer à la Jeanne d'Arc de l'audiovisuel. Un peu comme si, du côté des pays, on décidait tout à coup d'abandonner l'option de l'Union européenne pour en revenir au États-nations et au nationalisme individuel.
Qui plus est, l'option nationaliste de Bertelsmann paraît devenir contagieuse, et inspirer d'autres marchés. Elle pourrait expliquer, par exemple, ce qui est en train de se passer en France autour de la vente de M6, dont le magazine Capital, citant Le Canard Enchaîné et La Lettre A, annonce qu'elle est entrée dans sa dernière phase (3). Et que le candidat le plus sérieux à la reprise des 49% du RTL Group dans M6 ne serait autre que… TF1! Comme l'explique le magazine économique, cette supériorité du groupe Bouygues est logique: puisqu'il est le principal concurrent de M6, il dispose des meilleures armes pour l'absorber au moindre coût.
MASTODONTES NATIONAUX
Cet éventuel rachat pose évidemment un "tout petit" problème de respect des règles de concurrence. Dans une Europe où l'on fait tout pour éviter que ne croisse encore la concentration (notamment dans les médias), voir un groupe exercer un quasi-monopole sur un marché national a de quoi quelque peu faire hausser les sourcils. S'il se réalise, le scénario évoqué en Allemagne, où Bertelsmann pourrait racheter son concurrent ProSiebenSat1, serait tout aussi anti-concurrentiel. Il va aussi sans dire que la constitution de tels conglomérats géants ne seraient pas non plus vue d'un bon œil par des consommateurs de médias de plus en plus méfiants, et déjà prêts à l'heure actuelle à n'accorder plus aucune confiance aux opérateurs classiques. Qui pourra s'étonner qu'un jour seuls les réseaux sociaux soient considérés comme dignes de confiance, si on en vient à un schéma "mastodonte privé unique vs service public"? Bien sûr, on n'en est pas là. Mais, s'il se réalise, l'éventuel avalage de M6 par son concurrent n°1 serait catastrophique à ce propos. Il conduirait aussi forcément à terme à une réduction drastique de l'offre. Et ce même au cas où, comme le prétend TF1, les deux entreprises resteraient statutairement distinctes.
SEUL SUR L'ÉTAL
Et le petit RTL Belgique, dans tout cela? L'annonce de la clôture de la procédure de vente de M6 confirme bien qu'aucun acheteur français n'a voulu intégrer la filiale belge dans son offre. Il n'y aura donc pas de vente groupée. RTL Belgique est laissé seul sur l'étal de l'hôtel des ventes. Même si le RTL Group espère en retirer un bon prix, il y a de fortes chances pour que le petit rejeton belge soit finalement vendu à vil prix, afin que le géant allemand s'en défasse rapidement et puisse mettre en place sa stratégie de repli national. Bien sûr, RTL Belgique est à l'heure actuelle un acteur incontournable des médias en Belgique. Les audiences de plusieurs de ses émissions font rêver la concurrence. Mais certaines s'effritent. Et, surtout, l'entreprise manque cruellement de souffle depuis qu'elle s'est défaite des membres de son management qui soutenaient un ancrage local fort. RTL se répète plutôt qu'innover. Elle en est toujours à considérer que c'est dans les vieilles marmites qu'on fait les meilleures soupes (dernier exemple en date: le retour de Place Royale sur RTL TVI après avoir d'abord été relancé sur Bel RTL). Comme déjà écrit ici, on ne peut non plus oublier les apports essentiels des programmes de M6 à ses succès d'audience. Enfin, à l'heure où LN24 commence à s'installer sur le marché, son bastion dans l'info pourrait bien, lui aussi, devenir de plus en plus fragile. Et, comme il constitue la clé de voûte de ce qui fait l'identité de l'entreprise dans le petit monde des médias de chez nous, remettre cette pièce clé en cause pourrait mener à l'effondrement de l'édifice.
Les Français n'ont pas fait un cadeau à RTL Belgique en forçant l'entreprise à se vendre en stand-alone, alors qu'elle ne vit pas ces derniers temps ses plus beaux jours et qu'elle n'est pas, à l'heure actuelle, dans ses plus beaux atours. La mariée pourrait clairement être plus belle. Et, si mariage il y a, il ne sera pas "Au premier regard". Ce sera une union de raison. Ou de désillusion. Pour le meilleur ? Ou pour le pire?
Frédéric ANTOINE.
Et si, pour une fois, on ne gardait pas juste pour soi les observations, les analyses, les études, les recherches, les commentaires… qu'on ne cesse de faire à titre académique, professionnel ou purement personnel ?
Regard médias
25 mars 2021
RTL GROUP SE REPLIE SUR SON PRÉ CARRÉ. LE STAND-ALONE BELGE SE PRÉCISE
24 mars 2021
REQUIEM POUR RTL BELGIQUE
Pour la céder avec M6 est le scénario le plus logique pour RTL Belgique, mais pas pour M6 semble-t-il. Sans M6, que pourraient faire toutes seules ces petites chaînes belges?
Il y a peut-être un autre plan…
C'est la fin d'un monde, mais le dénouement prévisible d'un scénario annoncé, que s'est mis en place depuis plusieurs années, et qui s'est accéléré l'année passée. Adieu le beau rêve du "vendeur de clous" de Charleroi Albert Frère de faire de Télé-Luxembourg une chaîne belge. En fumée l'ambition de Jean-Charles Dekeyser de créer en Belgique l'équivalent de RTL Grandes Ondes. Les logiques économiques à l'œuvre dans l'empire Bertelsmann sont implacables, et n'ont que faire des amitiés historiques belgo-françaises remontant à l'époque de Radio Luxembourg. Le RTL Group est une entreprise mondiale, et surtout germanique. Il n'a donc cure du conserver ce penchant francophile qui était lié depuis les années 1930 aux activités historiques de la CLR (Compagnie Luxembourgeoise de Radiodiffusion), devenue CLT lorsqu'elle décidera aussi de se lancer dans la tv…
RTL BELGIUM, REMY SANS FAMILLE?
Le quotidien L'Echo, visiblement très bien renseigné sur le dossier (1), confirme ce que nous écrivions ici en décembre dernier (2) lorsque le RTL Group avait décidé de racheter les parts de RTL Belgique qui ne lui appartenaient pas, et de contrôler de la sorte à 100% sa filiale belge. A l'origine, cette récupération avait bien comme but d'être en phase avec le sort voulu par le groupe pour sa filiale française M6. Non pour fusionner la part belge avec le groupe français et low-costiser l'offre belge, mais pour faire un gros package avec les deux entreprises, et vendre l'ensemble au plus offrant. Des bruits de mise en vente de M6 avaient filtré depuis la fin janvier. Ils amenaient, évidemment, à s'interroger sur le sort réservé dans ce cas aux 100% que le RTL Group possédait désormais RTL Belgique. Tout est donc maintenant plus clair.
On comprend ainsi mieux pourquoi RTL Belgium avait si rapidement repoussé l'offre faite en mai dernier par la Fédération Wallonie Bruxelles de lui accorder une plantureuse "aide covid" en échange d'un retour des chaînes du groupe TVI sous le contrôle du CSA belge. Lorsque, en septembre 2020, la direction de RTL Belgium a donné à cette offre une fin de non-recevoir, elle savait déjà que la filiale belge était condamnée. Pourquoi aurait-elle dès lors dû acceptr de passer sous les fourches caudines du CSA belge, alors que le futur propriétaire de RTL Belgium, si futur il y a, ne serait plus dans les conditions de bénéficier également d'une licence d'émission au Luxembourg…
LE MODELE TF1
Mais voilà… on apprend dans le même article de L'Echo que, depuis peu, le RTL Groupe aurait décidé d'abandonner l'idée du package et voulait désormais séparer les deux dossiers de cessions. Il comptait bien au départ vendre le tout en une fois… mais aucun éventuel acheteur français n'a souhaité se charger du fardeau du petit poucet belge. Et pour cause: assumer les coûts d'une télévision 'belge' relativement autonome de M6 seulement destinée à 4 millions de personnes, cela revient trop cher le téléspectateur. Le nouveau propriétaire de M6 préfère attendre que RTL Belgique disparaisse du paysage. Il pourra alors faire la même chose que TF1: destiner à la Belgique un signal de ses chaînes françaises où seul les écrans publicitaires seront différents et ciblés. Tout bénéfice pour un coût quasi nul.
En cas de mort totale de RTL Belgium, les téléspectateurs belges auront en effet toujours envie de retrouver les programmes de M6 dont débordent les grilles de RTL TVI et de ses petites sœurs. Quoi de plus simple dès lors que de continuer à les leur proposer, mais 100% made in Paris. Avec, de temps à autre, comme sur TF1, un petit candidat belge glissé dans les émissions autant afin de faire sourire les Français que pour dire aux "clients" belges: "On ne vous oublie pas" (car c'est bien de clientèle qu'il s'agit ici).
UN AMATEUR DANS LA SALLE?
Le scénario de la mort à court terme de RTL Belgium n'emballerait toutefois pas le RTL Group. C'est vivant, et non mort, que le géant allemand veut vendre sa poussière d'empire audiovisuel, afin de faire un "max de bénef" Les sources consultées par L'Echo semblent dire que RTL espère retirer un plus haut profit en séparant les deux ventes qu'en les groupant. Est-ce bien le cas alors que le désintérêt des Français pour les avoirs belges semble avoir beaucoup pesé dans le choix des scénarios de vente?
Pour que ce souhait de plus-value se réalise, il faudrait d'abord qu'un acheteur soit intéressé par RTL Belgium. Les groupes de presse belges, tout heureux de récupérer leurs billes en cédant Audiopresse au RTL Group en décembre dernier, sont-ils cette fois prêts à mettre fortement la main au portefeuille pour glisser plus qu'un pied dans l'audiovisuel privé de notre mini sous-patrie?
En faisant le tour du pauvre paysage médiatique de la Belgique francophone, au vu de ce que IPM a déjà dû trouver pour s'offrir les Editions de L'Avenir, il serait étonnant que le groupe de la rue des Francs ait encore le souffle de se lancer dans la course. Tous les regards se tournent dès lors vers le seul autre groupe qui nous reste: Rossel. De de côté, la chose est loin d'être exclue. Au lendemain du rachat des parts belges dans RTL Belgium par le RTL Group, une déclaration de l'administrateur général du groupe à un des journaux qui lui appartiennent laissait plus que la porte ouverte: « Il y a eu de notre part
des propositions de rachat de l’ensemble des opérations mais RTL n’a
pas voulu envisager une vente (…). A partir de là, il fallait juste négocier les
conditions de sortie. » (3) Aujourd'hui, ce qui ne paraissait pas possible hier l'est devenu…
Le groupe de la rue Royale, qui avait jadis cédé ses radios pour créer Bel RTL, va-t-il reprendre à sa charge tout RTL Belgium? Rossel est en tout cas insatiable, et toujours en quête de secteurs pour se développer. Jusqu'à présent, on y est estimait que, en Belgique francophone, tout ce qui était à prendre avait déjà été pris (Cine-Télé-Revue clôturant le tableau de chasse, le groupe ayant bien compris qu'on ne lui aurait pas pardonné de racheter en plus les Editions de L'Avenir). Alors oui, l'audiovisuel privé belge, pourquoi pas? Mais Rossel ne se mettrait-il pas un chameau sur le dos? Les résultats actuels du groupe ne sont semble-t-il, pas très convaincants… sauf en ce qui concerne le secteur publicitaire lié à IP, qui est encore une poule aux oeufs d'or.
Si Rossel n'entrait pas dans la danse, c'est du côté flamand que de l'intérêt pourrait se manifester. L'ogre Telenet, qui lorgne toujours sur VOO, pourrait aussi avoir envie de bourrer ses tuyaux de contenus francophones. Ce groupe américain serait alors opérateur télévisuel des deux côtés de la frontière linguistique. Il n'y a par contre pas de chance que DPG Media, ex-Pergroep, se lance dans l'aventure. Même s'il est aujourd'hui le seul propriétaire des chaînes de VTM, avec lesquelles le RTL Group a des échanges, DPG a laissé tombé tous ses avoirs écrits en francophonie. Pourquoi y reviendrait-il dans la radio-tv?
ADIEU LUXEMBOURG, ADIEU
Quel que soit le futur, une chose est sûre. Si RTL Belgium ne disparaît pas faute d'acheteur, le nouveau propriétaire sera tenu de continuer à entretenir des liens étroits avec le groupe M6 (ou son équivalent futur). RTL TVI fait ses plus fortes audiences de prime time, celles qui lui rapportent le plus par ses écrans pub, avec des produits français de M6, ou au pire grâce à leurs déclinaisons belges. Une part de ses cases d'access sont aussi occupées par des produits M6, et les émissions du groupe français nourrissent de même fortement les autres chaînes de RTL Belgium. En radio, Bel RTL 'emprunte' chaque jour plusieurs heures d'antenne à RTL Paris, dont l'émission la plus porteuse (et donc la plus rentable) de l'après-midi: Les grosses têtes. Et ne parlons pas de RTL Play, qui n'est une copie de M6 Replay. Bien sûr, RTL Belgium achetait déjà ces produits à M6. Mais dans un cadre de groupe.
Que se passera-t-il demain? Si RTL Belgium s'en sort, il y a fort à parier que, pour réduire les coûts, son actionnaire fera passer le groupe à l'essoreuse à salade. La radio et la télévision sont des médias où les coûts fixes sont largement prédominants. Pour diminuer les dépenses, il faut donc, pardonnez l'expression, "trancher dans le gras". Réduire le nombre de chaînes et de stations radio serait le plus simple car, côté économies, la direction actuelle de RTL Belgium a déjà été bien loin à l'os dans ce qui était imaginable, et ce pour satisfaire au mieux le RTL Group. Et pour que celui-ci, en échange de tous ces sacrifices, finisse par simplement décider de s'en défaire… On peut donc redouter que, à terme, les effectifs du groupe ne fondent comme chocolat glacé au soleil.
En tout cas, si RTL Belgium subsiste demain, le groupe et ses médias ne porteront sans doute plus le nom "RTL". C'est donc bien la fin d'un monde. Et les dernières pages de la chronique d'une mort annoncée.
Frédéric ANTOINE.
(1)Michel SEPHIHA, Peter HAECK, "RTL Belgique est à vendre", L'Echo 24/03, 3h45. (https://www.lecho.be/entreprises/media-marketing/rtl-belgique-est-a-vendre/10293107?utm_source=SIM&utm_medium=email&utm_campaign=&utm_content=&utm_term=&M_BT=7144010073)
(2) RTL Belgique à 100%entre les mains du RTL Group: ce n'est pas une bonne nouvelle (https://millemediasdemillesabords.blogspot.com/2020/12/rtl-belgique-100-aux-mains-du-groupe.html)
(3) Fin du mariage entre RTL et la presse écrite, article non signé in Le Soir (https://plus.lesoir.be/341025/article/2020-12-01/fin-du-mariage-entre-rtl-et-la-presse-ecrite)
22 mars 2021
LE SPECTATEUR, PIGEON DE «ON N'EST PAS DES PIGEONS»?
Mercredi 17 mars, On n'est pas des pigeons (ONPP), diffusé en direct et en prime-time sur La Une pour les dix ans du programme, n'était-il pas… une arnaque?
Un lancement attendu
Clou annoncé de cette émission anniversaire : un lâcher comparatif de valises depuis le haut de la tour Reyers, afin de déterminer si c'est bien la Samsonite qui, comme l'affirme sa pub, résiste le mieux aux chocs. Ce moment-show immanquable est annoncé dès le début de l'émission, la tour Reyers figurant dans le split-screen montrant les différents lieux du tournage en direct (fig. 1). Quelques secondes plus tard, le lieu de l'expérience et les valises concernées seront filmés en gros plan tandis que le présentateur annoncera ce super-test (fig 2).
Fig. 2 |
Fig. 1 |
Comme il se doit dans toute bonne production audiovisuelle, ce must de la soirée est diffusé à la fin du programme, ce qui devrait inciter le spectateur à ne pas zapper en cours de route. On ne manquera donc pas de lui rappeler de ne pas rater cette séquence. A la 33e minute, l'événement fera l'objet d'une présentation en direct, avec images de la tour Reyers filmée par un drone. A la 36e minute, on se retrouvera au sommet de la tour en compagnie de l'ancien présentateur de l'émission, chaudement habillé (c'est lui qui sera chargé de balancer dans le vide les valises à tester) (fig. 3). Quand on le présentera à l'antenne, il fera même un petit signe "coucou" à la caméra.
Fig. 3 |
Une relance avec des images de la tour aura encore lieu 1h06 après le début de l'émission. Alors qu'un de ses collègues teste un plat concocté en direct, l'animateur de l'émission s'adressera au téléspectateur en ces mots: "Pendant que vous goûtez, regardez ce qui est en préparation en ce moment au sommet de la tour RTBF (…) M. Samsonite, dans un instant, nous allons vous jeter du haut de la tour Reyers." A 1h07, l'image montre à nouveau l'ancien présentateur de l'émission saluer les téléspectateurs depuis le sommet de la tour. Aucun dialogue ne s'établit entre lui et le studio, mais le présentateur lui lance: "Salut Seb, à dans deux secondes, à l'extérieur du bâtiment." A 1h09, l'animateur ré-interpelle M. Samsonite, annonçant qu'on va le jeter de la tour. Ensuite, une voix off fait une annonce avant un écran pub: "Dans un instant, nous allons jeter plusieurs valises dans le vide (…). A tout de suite sur La Une". Le moment du lancer de valise a donc quasiment fait l'objet d'un compte à rebours.
Pluie et rhabillage
Après l'écran pub, on se retrouve à l'extérieur, au pied et au sommet de la tour. "Bonsoir ou rebonsoir, dit alors l'animateur. La soirée qui vous fait gagner des sous continue. On a complètement changé de décor, puisqu'on surplombe tout Bruxelles. On est sur la tour Reyers pour défier les grandes marques. Malheureusement je vous avoue, ce soir la vue est un poil bouchée". Et, comme il disait ces mots, voilà que la pluie s'abat de plus belle sur le toit de la tour. Il y pleut plus qu'à verse.
"Tiens? Etrange", ont peut-être alors pensé des téléspectateurs bruxellois en regardant par la fenêtre (si, à cette heure tardive, ils n'avaient pas encore baissé leurs volets). Chez nous, pas de pluie. Il doit y avoir un micro-climat près de ce cette tour." Mais bon, pas de quoi fouetter un chat. Peut-être pas sûr. Les observations relevées par l'IRM à Uccle révèlent en effet qu'il y a bien eu de fortes précipitations sur Bruxelles (8 mm sur un jour alors que la moyenne est de 1,8 mm/jour)… mais le mardi 16 mars. Le mercredi 17, il n'est tombé que 0,5 mm de pluie. Ce jour-là, le ciel s'est-il juste déversé sur la tour Reyers, et pile aux environs de 21h30?
fig. 4 |
Panne de logo
Ces quelques indices laissent un peu songeur. Et ne peuvent empêcher qu'on en vienne à se demander si, réellement, cette séquence de "lancer de valises" a bien été réalisée en direct à la suite de l'émission en studio, ou si elle n'aurait pas, par hasard, été pré-enregistrée. Cette mauvaise pensée quitte évidemment tout de suite les esprits honnêtes, car on ne peut envisager qu'une émission se voulant le Zorro de la consommation, dénonciatrice des arnaques en tous genres et chasseuse de vérité, ait elle-même tronqué celle-ci pour ses téléspectateurs. On ne peut pas y dire tout le temps que "on va se rendre tout de suite" à un "lancer de valises" si celui-ci a été pré-enregistré. Dans pareille émission, qui a sa réputation à tenir, on ne peut pas "faire croire" à du frais quand c'est du mis en boîte.
fig. 5 |
Et si c'était pas vrai?
Si tel est le cas, bravo aux juristes. Jamais on ne pourra accuser l'émission de tromperie sur la marchandise, puisqu'elle n'affiche plus à ce moment la fameuse mention "Direct". Très bien. Sauf que, lors de la première partie de 1h10, les images des préparatifs du lancer étaient, elles, toutes accompagnées du logo "Direct". Pas top. Et puis, tout a été fait pendant la "première" partie pour laisser croire que la "deuxième" partie de l'émission se déroulait elle aussi en direct, et était la suite de ce qui avait été réalisé en studio. Dans les cas qu'étudie si souvent cette émission, les "promesses trompeuses" ne sont-elles pas autant dénoncées que les tromperies elles-mêmes? Faire croire à quelqu'un·e qui ne décortique pas l'image pixel par pixel que le récit montré tient bien d'une seule pièce et se situe dans la même temporalité est médiatiquement pertinent. Mais cela correspond-il à ce que l'on peut attendre d'un programme qui dit de lui qu'ONPP est "un cri du cœur et un cri de consommateur-acteur"?
Bien sûr, tout ce qui précède n'est que suppositions et hypothèses. Il a peut-être très fort plu pendant quinze minutes sur Reyers ce soir-là. Certains membres de l'équipe ont peut-être réussi à se changer en un temps de record du monde. Et le logo "Direct" (ainsi que celui de La Une) n'ont peut-être pas été insérés pour une cause technique, ou parce qu'ils ne sont pas "passés" lors du transfert sur Auvio, contrairement à aux mentions de la première partie. Et Auvio a peut-être découpé l'émission en deux parce qu'elle était trop longue, ou parce que le personnel en poste a cru qu'il s'agissait de deux émissions différentes, ou parce que ça faisait bien… Qui sait. On aimerait fortement espérer que ces "peut-être" soient des réalités. Car ONPP est souvent une super émission. Et on ne peut que l'aimer comme pépite du service public. Sauf, par exemple, quand, sous prétexte d'expliquer aux gens comment faire des économies, on leur apprend à arnaquer les petits commerçants du coin en négociant partout pour réduire des prix qui, en Belgique, sont fixes…
Frédéric ANTOINE.
21 mars 2021
QUI EST CE MYSTÉRIEUX NARRATEUR OMNISCIENT DE LA SÉRIE SUR SALAH ABDESLAM (RTBF-VRT) ?
Dans la version originale de cette série d'enquête-reportage diffusée par la VRT, "il" apparaît simplement sous l'intitulé de "familielid" ('membre de la famille'), ce qui ne veut en définitive pas dire grand chose à son propos, ni au sujet de sa proximité avec M. Salah Abdelsman (1). Ce "familielid"revient à de nombreuses reprises à l'écran dans le premier épisode de la série, un épisode destiné à inscrire le terroriste dans son univers et celui de sa famille, mais aussi à raconter les jours précédant les attentats de Paris.
Le jeune homme dont question ici est filmé à contre-jour, dans ce qui ressemble à une cafeteria située aux derniers étages d'un bâtiment du centre de Bruxelles. S'exprimant dans un français de grande qualité, recourant à des termes précis et à des mots extrêmement choisis, il n'est sans doute pas Belge, ou issu de l'immigration marocaine en Belgique. A un moment, dans une de ses interventions, il utilise en effet l'expression "soixante-dix" au lieu de "septante". Comme on le sait, la formule "soixante-dix", reposant sur la vieille règle de calcul par vingt et non par dix, est usitée en France et non en Belgique, mais… est enseignée dans les cours de français donnés en Flandre, où il s'agit d'enseigner la langue de Voltaire et non celle de Simenon. Fort de cela, il y a donc très de peu de chances que le personnage en question puisse être un proche direct de M. Abdeslman, même s'il est un membre de sa famille… Or, dans son récit, tout est là pour affirmer le contraire.
OMNISCIENT
Ce "familielid" semble en effet tout connaître de la vie du futur terroriste. Alors que divers témoins extérieurs à la famille sont interviewés par les auteurs de la série, qui recourent aussi à des reconstitutions d'interrogatoires clairement réalisées à partir de documents officiels, le "familielid" intervient fréquemment pour apporter une confirmation, une certification, aux dires des autres personnes. Comme s'il savait, mieux qu'elles-mêmes, ce dont elles parlaient.
Mieux que cela, il donne l'impression d'avoir été présent à de nombreux moments de la vie de M. Salah Abdeslam, notamment lors sa jeunesse à Molenbeek, comme s'il les avaient vécus avec lui. Et, surtout, il paraît avoir été avec lui et sa famille très proche pendant les derniers jours précédant les attentats de Paris. Il apporte ainsi un témoignage très fort à propos du "dernier baiser" que le frère du terroriste (qui décédera en kamikaze pendant les attentats) pose en pleine nuit, et alors que celle-ci est endormie, sur le front de sa mère avant de partir pour Paris. Son témoignage laisse à penser qu'il était dans la chambre de cette dame au moment où cela s'est passé. Or, c'est évidemment impossible.
Il raconte aussi, comme s'il y avait assisté, la dernière rencontre entre M. Abdelsman et sa fiancée, moment où le terroriste lui laisse comprendre ses intentions et lui fait ses adieux. Et ce alors que les deux personnes concernées étaient clairement seules lors de ce rendez-vous. La fiancée de M. Abdeslman s'étant rapidement confiée à la police par la suite, il eût fallu que le "familielid" soit aussi fort proche de cette personne-là pour pouvoir rapporter cet événement intime. Il est en effet à peu près impossible que le "familielid" ait eu un contact direct avec M. Abdeslam entre cette séance d'adieux et le moment des attentats. A moins qu'il ait alors (ou plus tard) accompagné dans sa fuite. Mais il est alors fortement impensable que ce personnage livre à la VRT pareille interview alors qu'il serait, en fait, un complice d'Abdeslam, toujours en liberté et nullement inquiété…
ETRANGE TEMOIN
"Membre de la famille", ce personnage donne donc l'impression de tout savoir et d'avoir été présent à tous les moments-clés, ce qui n'est pas possible. Ce qui pose la question du poids réel d'un témoignage qui se présente, tant par la forme de son récit que par l'expression qu'en donne l'auteur, comme étant "de première main". Alors qu'il ne peut l'être.
La critique historique distingue clairement trois types de témoins: le "témoin direct", le "témoin indirect" et le "témoin indépendant". Le "familielid" auquel on a recours dans ce premier volet de la série y est présenté comme un "témoin direct". Or il est, au mieux, un "témoin indirect", et probablement plutôt un "témoin indépendant". Il n'est en effet pas quelqu'un qui a assisté à tous les événements qu'il narre. Ni sans doute quelqu'un qui aurait eu des rapports directs avec les principaux protagonistes de l'affaire, qui lui en auraient raconté certaines scènes (en tout cas, il ne déclare jamais que ce qu'il affirme lui a été rapporté par quelqu'un). Il est donc plutôt une personne qui, ayant collationné diverses informations venant de sources variées, les a "compilées" et en a refait une histoire. Cette enquête-reportage laisse toutefois une toute autre impression…
VRAI NARRATEUR
On pourrait s'étonner qu'une série de ce niveau utilise ce type de subterfuge. Si ce n'est pour l'utiliser afin de nourrir son récit. Car finalement, c'est bien d'abord à construire la narration que sert ce personnage inconnu. Alors que le film n'a pas de réel narrateur permanent, dans ce premier épisode, c'est le "familielid" qui remplit en fait ce rôle. C'est lui qui assure l'existence d'un fil rouge. Il est l'élément fournissant au récit sa cohésion et sa dynamique.
On n'ose imaginer que, pour remplir ce rôle avec autant de brio, ce "familielid" ait été quelque peu "briefé" ou "aidé" par la production afin d'avoir la capacité de fournir pareil témoignage. Ni que les grands axes de ses interventions lui aient été quelque peu "soufflées à l'oreille". De même, on ne peut évidemment penser une seule seconde que l'expression "soixante-dix" lui a été suggérée par des membres de l'équipe de production ayant acquis leur connaissance du français dans le cadre scolaire flamand. Tout cela n'est pas pensable. Nous sommes ici devant un journalisme de haute qualité, qui ne peut bien sûr être suspecté de la sorte.
Reste donc, néanmoins, à se demander qui est bien ce curieux personnage, et d'où il tient cette connaissance si précise d'événements qui se sont déroulés dans le secret de l'intime…
Frédéric ANTOINE.
20 mars 2021
IPM PLACE SES JALONS A L'AVENIR
Le 15 mars dernier, les médias du groupe IPM ont annoncé la nomination d'un nouveau rédacteur en chef pour le quotidien L'Avenir, devenu officiellement propriété du groupe bruxellois au début de cette année. Le choix de la personne chargée de diriger une rédaction est forcément porteuse de sens. Ce dernier est en effet non seulement désigné pour animer la rédaction, mais aussi pour en orienter les choix éditoriaux, voire pour y mettre en œuvre ceux qui ont été définis par la direction du groupe.
En l'occurrence, le choix opéré par les instances d'IPM peut, peut-être, laisser entrevoir les intentions de la maison-mère à l'égard de sa filiale wallonne, ou à tout le moins pousse à se poser des questions à cet égard.
Du "sérail"
L'option retenue a été celle de doter L'Avenir d'un rédacteur en chef "du sérail". Pas du sérail du groupe L'Avenir, mais du groupe IPM. On n'a pas opté pour la désignation à la tête du journal d'une personne issue de sa propre rédaction, connaissant bien le produit avec ses qualités et ses faiblesses, et ayant vécu les difficiles années que le quotidien vient de connaître suite aux tiraillements entre les journalistes, leur ex-propriétaire et le directeur des rédactions qui, là aussi, avait été parachuté à Bouge.
Mais la personne n'a pas, non plus, été choisie hors du cénacle d'IPM. On aurait pu imaginer que, comme le fit Nethys, IPM se soit tourné vers l'extérieur pour trouver la personne providentielle chargée de booster le quotidien wallon et de l'envoyer sur orbite. Les personnalités brillantes, qui ont déjà piloté des rédactions ou connaissent bien les spécificités de la presse régionale, ne manquent ni en Belgique ni en France, par exemple.
IPM a donc décidé de choisir en interne un de ses hommes. Nous aurions eu envie d'écrire "un de ses pions", mais la qualification péjorative du terme, que Larousse définit comme "Personne, élément qui ne joue qu'un rôle minime, qui est manipulé, dont on dispose arbitrairement", nous empêche évidemment de recourir à ce mot. Nous n'écrirons pas non plus "une de ses femmes" car ce groupe n'a pas coutume, dans ses activités de presse, d'attribuer à la gent féminine un grand nombre de responsabilités essentielles (1).
Un professionnel de terrain
IPM délègue donc à L'Avenir un de ses hommes. On ne peut y voir qu'une volonté de veiller à ce que L'Avenir s'inscrive bien dans les rails du groupe propriétaire, et ne cherche à jouer cavalier seul. Le passé a en effet montré que la rédaction du titre wallon ne manquait pas de velléités d'indépendance. Il s'agit ici qu'elle reste bien dans les rangs. Ce rôle est la moindre des fidélités que la direction d'une entreprise puisse attendre de la personne à qui elle offre une promotion au sein de son groupe.
Au sein d'IPM, deux choix s'offraient à l'actionnaire. Détacher à L'Avenir un gestionnaire ou un journaliste. C'est ici la seconde option qui a été retenue, et on peut s'en réjouir, car il s'agit bien de piloter une rédaction chargée de produire de l'information, et non d'abord de la gérer.
Restait dès lors à déterminer d'où viendrait la perle rare. On aurait pu imaginer que l'heureux élu soit issu des rangs de La Libre. Non tant parce que les deux titres partagent le même passé d'appartenance au giron catholique, mais pour la vision qu'ils ont en commun de ce qu'est une information de qualité, originale et exigeante. Le slogan du titre namurois, que son propriétaire a maintenu dans les spots publicitaires diffusés pour l'instant (alors qu'il existe depuis 2015), n'affirme-t-il pas que "L'avenir est au contenu"? Evidemment, La Libre n'a (plus) aucune ambition d'être un quotidien à composante régionale. Cela ne plaidait donc pas en faveur d'une sélection de ce côté.
Le choix s'est donc fait du côté de La DH-Les Sports. Ce quotidien affiche neuf éditions régionales en ligne et sept éditions sur papier. Il s'agit donc d'un titre revendiquant un ancrage dans la presse régionale, ce qui n'est pas sans poser question en rapport avec le rachat de L'Avenir… mais aussi avec la nomination, à la tête de sa rédaction, d'un personne qui occupait le rôle d'adjoint du rédacteur en chef de La DH.
Orienter L'Avenir
Par cette sélection, IPM a-t-il choisi de mettre à la tête de L'Avenir une personne ayant fait une partie de sa carrière dans la presse régionale parce que c'était le moyen d'être le plus en phase avec l'identité de la rédaction du titre namurois? L'idée paraît évidente, même si le curriculum vitae de la personne concernée révèle qu'elle a principalement été active dans l'actualité judiciaire et le fait divers.
D'autres scenarii ne sont-ils envisageables? Le directoire d'IPM entend-il ainsi veiller à ce que L'Avenir pratique dorénavant une locale plus populaire (et donc proche de celles des techniques de La DH), ce qui pourrait permettre de rajeunir (et d'urbaniser) le lectorat d'un titre beaucoup trop confortablement enfoncé dans ses vieilles pantoufles?
Dans un autre sens, IPM n'aurait-il pas un jour le projet de "dé-régionaliser" la DH, en confiant à L'Avenir seul le pôle local du groupe, mais en mixant dans ses contenus les caractéristiques populaires du titre bruxellois et la localité du journal namurois? Un bon rédacteur en chef serait bien utile dans cette perspective. Dans pareil scénario, on pourrait imaginer que la DH se voie recentrée sur l'info-géné et, surtout sur le sport, et non sur le local.
A l'inverse, le projet final se serait-il pas de bipolariser la couverture régionale du groupe, en distinguant d'une part une locale plus urbaine, plus associée aux faits divers et au judiciaire, qui serait aussi liée aux grands clubs de sports, et serait portée par la DH et, d'autre part, une locale plus semi-rurale, plus traditionnelle, qui resterait l'affaire de L'avenir? Mais faut-il recourir à une nomination interne provenant justement de La DH pour mettre en œuvre pareil projet?
A moins que, au lieu de tout cela, la logique et la rationalité économique, qui prévaut souvent chez IPM, n'amènent à terme à la disparition des deux titres, et à leur fusion dans un projet commun alimenté par les deux produits actuels. La possible disparition à ± moyen terme des éditions papier, qu'annonce de longue date le management d'IPM, pourrait y contribuer. Tout comme elle pourrait aussi, a contrario, aboutir à une disparition de La DH "papier", mais au maintien (au moins temporaire) de L'Avenir sur ce support, en raison du profil de son lectorat.
L'avenir de L'avenir n'est pas encore écrit. Mais, comme mentionné dès le début de ce texte, la délégation sur les hauteurs de la capitale wallonne d'un haut responsable de La DH ne peut empêcher de se poser des questions. Rien que des questions. Sans aucune autre intention.
Frédéric ANTOINE.
(1) sinon dans ses branches marketing et autres activités, où les femmes occupent d'importantes fonctions.
04 mars 2021
Enquête en ligne sur le consommation des médias en temps de covid
Toutes ces questions, on se les pose, mais on dispose de peu de moyens d'y trouver des réponses. C'est la (modeste) ambition de ce questionnaire mis en ligne, et auquel il est souhaitable qu'un maximum de gens réponde.
Le
compléter prend entre 15 et 20 minutes. Merci d'y répondre et de faire
circuler le lien vers le questionnaire sur tous vos réseaux.
Il est accessible à l’adresse :
02 mars 2021
UNE "BRIQUE DANS LE CHÂTEAU" : À LA RTBF LA PUB N'EST-PAS QUE DANS LES ÉCRANS PRÉVUS POUR…
Les téléspectateurs de l'émission de bricolage de La Une auront sans doute tous récemment fini la vision du programme avec une seule envie: celle de passer une nuit au Château de XWJKFSL(1), à SQYTTM (1). Ce charmant lieu de villégiature a en effet eu droit, au beau milieu de l'émission, à spot promotionnel de 3'10. Hors écran pub.
" Pour passer une nuit au château de XWJKFSL, il faut compter un budget entre 99 et 325 euros. Quant au programme de la journée, la piscine chauffée et son panorama époustouflant ainsi que le magnifique parc de 30 hectares suffiraient à occuper les hôtes des lieux. Mais ils peuvent aussi se prélasser dans l'espace, bien être ou méditer dans l'ancienne chapelle. Autre objet de contemplation, une belle collection de voitures anciennes se laisse découvrir depuis le bar. Et pour finir, la visite de la Drôme. Côté papilles et produits de terroir, le restaurant du Château est aussi l'occasion de découvrir cette magnifique salle voûtée entièrement recouverte d'une pierre blanchie à la chaux. Cette rénovation est donc un beau conte franco-belge avec en prime, les trésors de nature et d'histoire de la Drôme provençale." Si, à la fin d'une séquence totalement consacrée à présenter le château de XWJKFSL, ceci n'est pas un texte promotionnel, il faudra expliquer ce qu'on doit entendre par "publicité rédactionnelle" à la télévision…
Douce France
Le sujet dont il est question ici commence à 12'10 de l'émission. Il est précédé d'un panneau sur fond bleu intitulé "Week End", comme il en existe d'autres dans ce programme pour marquer l'intitulé des différentes séquences. Il débute par des images d'une voiture de sport décapotable roulant au bord d'un champ de lavande, puis qui franchit le porche d'une propriété. Deux personnages s'avancent alors vers le spectateur, puis déambulent devant la superbe façade en pierre de leur domaine. La bande son, soutenue par l'air de Douce France de Charles Trenet explique: " Il était une fois deux Bruxellois en mal de nature et de soleil. C'est en visitant la vallée de la Drôme que le couple a décidé de quitter travail et patrie pour tenter une nouvelle aventure pleine de promesses. Un coup de foudre démesuré pour un château du 16ème siècle niché en pleine nature."
Jusque là, rien d'anormal: on assiste bien à une séquence info sur ce que ces deux Belges ont fait de ce château. Les plans suivants montrent la bâtisse sous toutes ses coutures, y compris sa piscine (à débordement?), tandis que les propriétaires expliquent comment ils l'ont remise en état. A ce moment, la voix-off commence à être un peu dithyrambique : "Le château XWJKFSL était donc une belle endormie, bien loin de l'hôtel de charme qu'il est devenu aujourd'hui. Il a fallu trois ans de travaux de sueur et de passion pour redonner vie au bâtiment et y aménager 32 chambres de luxe." Alors que la caméra suit la propriétaire, qui guide le spectateur dans une visite de l'intérieur des lieux, de ses sublimes chambres et de ses salles de bain à tomber par terre, le commentaire s'attarde sur la rénovation. On y relève notamment: "une décoration discrète et intemporelle qui se conjugue parfaitement avec les volumes vertigineux et le caractère ancestral du château. Côté salle de bains, c'est le confort et la symétrie qui priment, avec des courbes voluptueuses et des coloris contemporains."
Epoustouflant, voluptueux
Au détour d'une chambre royalement bien redécorée, le propriétaire revient à l'image pour une partie un peu plus technique, qui sert sans doute de prétexte à cette séquence promotionnelle. Alors qu'une animation en surimpression complète son récit, il y explique, en 17 secondes, la solution écologique choisie pour chauffer l'ensemble : la géothermie. Ensuite survient la séquence finale dont le propos est reproduit en début de ce texte, et qui comprend donc le prix de la nuitée, ainsi qu'un inventaire des services proposés, sur un ton particulièrement élogieux. La séquence terminée, pour être complet, il ne manque qu'à y ajouter les références du site web et un numéro de téléphone.
Une rapide analyse lexicale du commentaire relève que le commentaire recourt 4 fois à l'usage de l'adjectif "beau", et 2 fois à "magnifique" et "ancien", auxquels on peut ajouter "époustouflant" ou "voluptueux". Les substantifs "chaleur" et "luxe", sont utilisés à deux reprises. La voix-off utilise aussi les noms "esthétique", "charme", "confort", "trésor". Et l'on pourrait poursuivre.
Mais c'est évidemment la forme générale du commentaire qui marque, et qui dépasse la "bienveillance" qu'un journaliste peut humainement manifester pour le sujet qu'il présente. A titre de comparaison, la description du même château, telle qu'on la trouve sur Booking.com, est cent fois mois positive et commerciale vis-à-vis de ce lieu que la voix-off de la séquence de l'émission.
Piratage?
Alors, est-on dans le cadre d'un sujet "normal" pour ce type d'émission? On sait, par exemple, que Brico y patronne une séquence, et le générique énumère une série de firmes ou d'organismes qui "soutiennent" le programme. Mais, à aucun moment, il n'est y fait allusion au château en question. Et si on remontre au début de l'émission, aucune notification du fameux "PP", qui annonce que le programme contiendrait du placement de produit. Or, selon l'article 21 du décret, cette mention est obligatoire (1), du moins dans certaines conditions.
Mais il semble bien que l'on soit ici au-delà du placement de produit. L'impression qui domine est que ce sujet de 3'10 est plus proche d'une "publicité rédactionnelle", voire un peu "pirate". En novembre dernier, la RTBF s'est fait condamner par le CSA pour publicité clandestine pour un parc d'attractions étranger lors de la finale de The Voice, produit par ITV Studios et DOK1 Media. Une démarche vis-à-vis du CSA dans ce cas-ci conduirait-elle à une décision du même type? Mais encore faudrait-il que quelqu'un l'engage…
Oh ben zut alors, voilà qu'en consultant la page "presse" du site internet du château de XWJKFSL, on découvre que notre émission de bricolage a déjà consacré une séquence à cet établissement le… 17/09/2018!!! Incroyable, mais Belge. D'une (vieille) pierre, deux coups ! Dommage que le document de l'époque ne soit plus sur Auvio. On pourrait s'assurer qu'il ne s'agissait pas de la même séquence…
Frédéric ANTOINE.
25 février 2021
CECI ÉTAIT-IL UN DOCUMENTAIRE? UN "GRAIN DE SABLE" DANS LA SOIRÉE DÉBAT DU MERCREDI SUR LA RTBF
Le "documentaire", intitulé Le grain de sable dans la machine, aurait en effet bien nourri un débat à lui tout seul. QR L'actu est une émission qui dépend du secteur "information"de la RTBF. Comme cela est indiqué au bas du générique final, elle est placée sous la responsabilité du directeur de l'information de l'organisme public. On est donc bien là dans un programme d'information et non dans une case de la grille consacrée à des documentaires. Dans ce cadre, on s'attend à ce que la production qui constitue la première partie de l'émission relève du journalisme et de la pratique de l'information. Mais, ceux qui se sont placés dans ce contexte, celui d'une émission d'info comme tous les mercredis soirs sur La Une, ont dû tomber de leur chaise ou glisser de leur fauteuil à maintes reprises au cours de la diffusion du Grain de sable…
L'excellent réalisateur de ce "documentaire" a le droit d'avoir une lecture personnelle des choses et de ce qu'il croit être la réalité, ainsi que de réaliser un produit audiovisuel qui la reflète. Tout comme l'auteur de Ceci n'est pas un complot pouvait, à titre personnel, avoir un avis sur la manière dont "le pouvoir" a conquis l'adhésion des populations pendant la pandémie. Mais cet avis peut-il servir de base à la réalisation d'un produit télévisé présenté comme relevant de l'information, alors qu'en réalité il est un support à la démonstration d'une thèse? Les bonnes intentions de l'auteur du Grain de sable… sont indiscutables. Mais il nous semble que le fait qu'elles aient été aimablement recueillies par une journaliste de la RTBF enthousiaste (1) dans un article promotionnant le "documentaire" ne nous empêche pas de nous poser quelques (lourdes) questions quant à sa présence au sein d'une émission d'information (2)
Un récit, deux structures
Tout comme Ceci n'est pas un complot, Le grain de sable… est écrit sur base de deux modes de structuration: l'un de type formel, l'autre relatif au contenu, au message porté. Dans les deux cas, la structure formelle est de type chronologique. La crise du covid est passée en revue de sa naissance à la fin 2020. Les étapes de la pandémie, ainsi que le fil des saisons, rythment dans les deux productions la progression formelle du récit (et de l'image). Cette évolution linéaire du temps est à la fois familière au spectateur, qui y retrouve sa propre expérience de la crise, directe ou par médias interposés, mais peut aussi ne pas lui donner envie de regarder un programme lui rappellent une fois de plus le rassassage d'infos sur le covid dont on n'a cessé de lui rebattre les oreilles depuis presque un an. Pour faire passer son message, il faut donc être prudent et ne pas taper trop fort sur les éternelles images choc.
Car cette structure formelle, en définitive, n'est qu'un prétexte. Elle fournit un récit alors que, dans les deux productions qui se disent des "documentaires", ce n'est pas la forme qui compte, mais le fond. Les auteurs entendent élaborer un discours, développer un point de vue sur la crise, en le faisant passer par les habits d'un support chronologique. Mais c'est bien le fond qu'ils cherchent à faire passer.
Un processus de persuasion?
Dans les deux cas, subtilement, ce fond ne se révèle que très progressivement, par petites touches. Il faut à ce propos saluer l'énorme qualité de la réalisation du Grain de sable… Les images y sont superbes, les enchaînements entre les plans relèvent de l'orfèvrerie (on ne s'en aperçoit qu'en décortiquant le film minutieusement). Et ne parlons pas du montage. Seule, comme dans Ceci n'est pas…, la lancinante répétition de la musique aurait, de temps à autre, pu être modérée.
Dans les premières minutes du programme, on est dans le rappel d'événements, dans l'évidence des faits. Puis, soit par le discours tenu on off, soit par les extraits d'interviews, la grille de lecture des événements se met en place. Et la construction de la thèse soutenue par l'auteur s'établit étape par étape. Par des moyens différents, qui distinguent l'une de l'autre les deux productions, le spectateur glisse irrésistiblement d'un partage de l'évidence à une entrée dans un processus de persuasion (3).
A ce propos, il est intéressant de noter que, dans les deux cas, la voix off parle à la première personne. Mais dans un contexte différent. Dans Ceci n'est pas…, le "je" est celui de l'auteur, qui se met en scène du début à la fin du document. Ce "je" est celui de l'expérimentateur, de celui qui doute, qui bâtit des hypothèses, voit des suspicions, voire des intentions malveillantes. Mais bien sûr pas de complot, tout de même. Enfin, pas vraiment, mais peut-être, on ne sait jamais. Bref, un "je" qui peut être intégré par le spectateur comme étant le sien. Dans Grain de sable…, on se trouve à l'opposé, ou presque. Le "je" est celui du virus du covid, vis-à-vis duquel on ne peut qu'avoir un sentiment de rejet. Mais, comme le renard de Saint-Exupéry, le covid finit par amadouer le spectateur, lui explique qu'en fait, ce n'est pas lui le responsable de la situation. S'il le suit dans son raisonnement, il finira presque par plaindre le pauvre "je-covid", tenu pour responsable alors qu'il n'y est presque pour rien, et se mettre à sa place…
Expertise et contre-expertise
Ayant toujours bien à l'idée que ce type de production entend affirmer une thèse (à défaut de la démontrer par A+B), asseoir les bases de son point de vue peut se réaliser soit par la propre expression de l'auteur, soit par le subtil recours aux experts. Ceci n'est pas… convoque les deux méthodes. Une partie du "raisonnement" est développée par la voix off, porte-parole de la pensée de l'auteur, et une autre par des extraits d'entretiens avec des experts. Grain de sable…, qui cherche à présenter formellement une configuration plus journalistique, ne met pas directement son auteur en scène, même si le "je-covid' de la voix off est clairement, à certains moments, la sienne. Tout passe ici par les "experts", et c'est ainsi que s'opère sans doute le plus beau tour de passe-passe de cette production: présenter comme des experts, c'est-à-dire des personnes compétentes, neutres, objectives comme des scientifiques, et ayant un regard objectif, des personnages qui sont, en fait, profondément engagées et ayant une lecture personnelle des choses et promouvant une cause.
La clé de lecture
Cela ne serait journalistiquement pas gênant si la production laissait s'exprimer des gens engagés, mais reflétant des points de vue ou des regards différents. Or tel n'est pas le cas. Au visionnement, la chose peut échapper au spectateur. Comme le film est à l'origine un projet pour Arte, qui le diffuse dans une case "Decryptage" —ce qui veut bien dire ce que ça veut dire— (4), il utilise à la fois des experts francophones et germanophones. Ces derniers sont tous totalement inconnus au spectateur de la RTBF. Or là se trouve la clé de lecture du "documentaire": de son titre à sa thèse, sans le dire, ce film repose sur les idées d'un homme: Fabian Scheidler, subtilement présenté sur l'écran comme un "essayiste et dramaturge", ce qui ne paraît pas à première vue lui permettre d'avoir des avis péremptoires sur l'avenir du monde. Au cours du film, ce personnage apparaît 9 fois à l'image en situation d'interview (5) et est en réalité à la fois "auteur, essayiste, philosophe, journaliste et dramaturge allemand" (6). Tout cela serait d'un intérêt relatif si l'homme n'avait pas publié en 2015 un livre qui a été un immense succès, et dont la version française s'appelle tout simplement La fin de la Méga-machine (Das ende der Megamaschine en V.O.). C'est ce livre porte le fond de la thèse du film: le covid n'a été qu'un petit élément dans une machine qui était déjà en piteux état. Le titre Le grain de sable et la machine est en filiation directe avec l'oeuvre de Scheidler. Sauf que ce n'est jamais dit dans le film et qu'il n'est jamais présenté comme l'auteur d'un livre sur la mégamachine. Alors que, par la voix off et les intervenants, le mot "machine" est prononcé 24 fois et "machines" 5 fois.
Identités floues
Cette absence de présentation claire de l'identité et du positionnement des intervenants n'est pas l'apanage de Scheidler. De nombreuses personnes sont présentées de manière très floue et anodine, alors qu'elles sont soit clairement engagées dans une cause, soit comme auteures d'ouvrages qui, dès le titre, ne mentent pas sur leurs intentions et leur positionnement.
Carola Rackete, qui apparaît dix fois à l'écran en interview, et est présentée comme "Pilote de navire et militante écologiste", est la fameuse capitaine du navire humanitaire Sea-Watch 3 qui, dans son livre Il est temps d'agir, défend la désobéissance civile comme mode d'action. Hervé Kempf (8 présences à l'image) est accompagné de la mention "Ecrivain et journaliste", alor qu'il est le fondateur de Reporterre, le quotidien de l'écologie, et a publié des livres aux titres évocateurs comme: Comment les riches détruisent la planète ; Pour sauver la planète, sortez du capitalisme ; Que crève le capitalisme ou Tout est prêt pour que tout empire.
Gaël Giraud, présenté comme "auteur et économiste", est aussi prêtre et jésuite. Economiste en chef de l'Agence française de développement de 2015 à 2019, il a publié : Au-delà du marché, l’imposture économique, Illusion financière, Vingt propositions pour réformer le capitalisme.
Sans dresser la liste exhaustive de la trentaine de personnes à qui l'on donne la parole dans ce programme, on relèvera encore qu'est présenté comme "fournisseur d'humanité", ce qui est le nom qu'il se donne lui-même, un ancien médecin d'Anderlues qui aide bénévolement les démunis et que la version allemande du programme désigne, elle, comme un "Sozialarbeiter" ("travailleur social"), ce qui n'est pas tout à fait la même chose.
Le peuple Kichwa du Sarayaku, en Amazonie équatorienne, est aussi pas mal présent dans le casting. Pas moins de trois de ses représentants y sont interrogés. Mais deux d'entre eux sont sans doute tellement connus qu'aucune mention n'a été jugée utile à côté de leur nom, alors qu'ils sont tous trois activistes contre l'extraction de pétrole sur leur territoire (chose qui n'est vraiment pas au coeur des propos recueillis là-bas, où on représente cette population plutôt comme les "bons sauvages du paradis perdu"). La palme de ce mensonge par omission sur les intentions exactes du "documentaire" revient ex-aequo, avec Fabian Scheidler, à Pablo Servigne, simplement présenté comme "Chercheur in-terre-dépendant et auteur", ce qui ne veut pas dire grand chose. Ce personnage, qui prend la parole 8 fois, n'est autre que l'auteur du best-seller Comment tout peut s'effondrer-Petit manuel de collapsologie, ainsi que de Une autre fin du monde est possible. Difficile de mieux anonymiser un personnage au positionnement clé, puisqu'il est un peu considéré comme le pape français de la collapsologie.
Subliminal
Dans Ceci n'est pas…, l'auteur évoquait ses études de journalisme à l'IHECS, où on lui avait appris à repérer les messages subliminaux. Et estimait en avoir vu pas mal en arrière-plan des présentateurs, dans les JT. Cela reste à démontrer. Dans Le grain de sable…, le message n'est pas vraiment subliminal. Mais son décodage n'est évidemment pas donné dans le "documentaire" lui-même. Le décryptage des identités complètes des personnes rencontrées, croisé avec leurs propos, peut conduire à estimer que cette production prend finalement la crise covid comme prétexte pour transmettre un autre message, qui est celui de la thèse du film. Ce message est porteur des idées des collapsologues, que soutiennent et développent plusieurs intervenants, et s'inscrit dans l'idée d'une disparition du capitalisme, qui pourrait être encouragée par divers moyens. De même, il menace le monde de graves rebéllions et soulèvenements, si on ne change pas totalement de cap. L'originalité de cette oeuvre est que, à côté des personnages présentés ici, elle se forge une légitimité non pas en donnant la parole à des tenants d'une autre thèse (car on est ici dans la démonstration), mais en s'adjoignant des interviews de personnes haut placées. Celles-ci n'annoncent pas l'effondrement programmé de la civilisation, face auquel le covid ne serait qu'une poussière, mais inscrivent leur discours dans le récit formel de la crise. On retrouve ainsi des gens comme Serge Tisseron, le commissaire européen Paolo Gentiloni, l'épidémiologue Marius Gilbert ou Charles Michel, dont la présence se semble valider, sans devoir le dire, que tout ceci est bien sérieux et indiscutable.
Sur le fléau de la balance, on placera un intervenant comme le député européen Philippe Lamberts, qui apparaît 9 fois à l'image, et dont le discours est plutôt alarmiste. Autre people connu, le comédien et humoriste Christophe Alevêque, dont les propos vont dans le sens de ce que veut aussi faire passer comme message le documentaire: assez des Etats et des gouvernements, il faut prendre chacun son sort en main et agir. Finalement, le risque d'effondrement du monde devient ainsi une évidence, communément partagée. Sans lien direct avec le covid, mais quand même.
A suivre
Le champ est large, mais l'interrogation posée en début de ce texte semble ne pas perdre en pertinence: un document porteur d'une thèse, même habillement habillée, peut-il être intégré dans une émission relevant du secteur de l'information comme s'il s'agissait d'une enquête-reportage mieux travaillée côté présentation? Et peut-il servir de base à un débat, sans avoir été présenté comme défendant une thèse partisane?
Affaire à suivre n'aurait-on pas envie de dire.(8)
Pour ce qui concerne Fabian Sheidler, voici l'explication donnée par le réalisateur: " Si Fabian est dans le film, c'est plus simplement pour la raison suivante: Pablo Servigne m'avait recommandé de contacter Fabian qui avait écrit un livre dont le titre rappelait le mien. J'y ai vu évidemment une conjonction de point de vue. J'ai lu son livre qui effectivement croisais mon regard. Belle rencontre, due au hasard tout simplement."
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