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Regard médias

Il y en a des choses à dire sur les médias en Belgique…

25 août 2024

Quand la RTBF manipule les frontières des villages de Wallonie


Bienvenue à Lustin, ses superbes jardins (d'Annevoie), ses délicieuses fraises (de Wépion), son remarquable vin (de Bioul)… Avec Mon plus beau village, la RTBF fait superbement fi de l'identité des villages wallons qu'elle croit promotionner, mélange le tout, et invite à voter pour une localité en fonction des trésors… qu'elle ne recèle pas. Au secours !

Mesdames et messieurs, les votes sont ouverts jusqu'à mercredi 28 août à midi pour choisir Lustin comme plus beau village de Wallonie 2024 ! La compétition l'oppose à Ciergnon, Feluy, Chassepierre, Waimes et Rebecq, dont les couleurs sont chaque fois portées par un animateur ou une animatrice de la RTBF. Votez, votez ! Et vous risquez de gagner un beau cadeau. Sauf que, si vous basez votre vote sur le portrait du village que vous a fourni l'émission consacrée à Lustin, diffusée ce 24 août, vous allez avoir tout faux, ou presque. Parce que la plupart des merveilles qu'on vous a présentées comme se trouvant à Lustin dépendent, en fait, d'autres localités.

UNE ERREUR OU UNE TECHNIQUE ?

N'habitant pas près des autres villages en compétition, impossible d'affirmer que le cas de Lustin est unique ou que la technique est utilisée par la production pour chacun des bourgs retenus, mais en tout cas une chose est sûre : pour Lustin, la RTBF vous a menés en bateau. Et pas qu'un peu.

Lustin est un village qui appartient à l'entité de Profondeville, localité qui comprend aussi Arbre, Bois-de-Villers, Lesve et Rivière. La particularité de Lustin est de constituer la seule partie de Profondeville à se trouver sur la rive droite de la Meuse, alors que toutes les autres composantes de la localité se trouvent côté gauche.

Lustin est donc borné, sur tout son flanc ouest, par le fleuve. Les autres localités limitrophes de Lustin sont, au nord, le village de Dave (rattaché à Namur), à l'est essentiellement celui de Maillen (et Ivoy) et au Sud ceux de Mont et de Godinne (commune d'Yvoir).

Si Lustin est mignon, est-ce un joli village ? La question peut rester ouverte. Par contre, la localité ne brille pas par ses attractions, pépites ou autres joyaux. Le site de la commune de Profondeville se contente ainsi essentiellement de vanter la beauté naturelle du lieu (1), tandis que le site lustin.be (2) (qui n'est plus mis à jour actuellement) reconnaît qu'en ce qui concerne les attractions touristiques, la localité est plutôt pauvre. Ce site ne recense, par exemple, que le musée des bières belges (qui a disparu aujourd'hui, et semble avoir sombré avec le covid), les rochers de Frêne, où se trouve le remarquable site du Belvédère qui offre une vue unique sur le méandre de la Meuse à Profondeville, et le trou d'Haquin, qui est une grotte-école. Point final.

LA GÉOGRAPHIE MANIPULÉE

 

Or voilà que, dans Le plus beau village, une pluie de merveilles touristiques s'est tout à coup abattue sur Lustin. On présente comme faisant partie du village tout une série de choses qui valent certes le détour, mais n'ont aucun rapport avec le village. A commencer, au sud-ouest, par Les Jardins d'Annevoie, qui se situent sur la commune de Anhée, sur l'autre rive du fleuve, tout comme le château et les vins de Bioul, eux aussi dépendant de Anhée. Au Nord du village, l'émission annexe le village de Dave à Lustin, pour y présenter le château Fernan-Núñez, superbe propriété qui se trouve bien sur la même rive que Lustin, mais dans un hameau fusionné à… la ville de Namur. Et qui n'a bondi en découvrant que, selon la RTBF, les fraises… de Wépion seraient des fraises… de Lustin. Comme Dave, Wépion dépend administrativement de Namur et n'a rien à voir avec Lustin. Sauf à refaire l'histoire (ce que l'émission ne fait pas) car on a bien cultivé la fraise à Lustin de 1925 à 1970 (il y a même eu sur place un "marché fraisier" officiel), mais depuis lors, la fraise de Wépion ne traverse plus La Meuse…

Dernier détail: le fort saint Héribert, dont on attribue également dans l'émission la paternité à Lustin, se trouve lui aussi sur le territoire de Wépion, à proximité du village de Saint-Gérard…

EMPRUNTS ET PHAGOCYTAGES

Pour être honnête, on concédera qu'en ce qui concerne les "villas mosanes" évoquées pendant la petite croisière que l'émission accomplit sur la Meuse, les situer à Lustin n'est pas totalement erroné. Lustin est en bord de fleuve, et en a bien hébergé quelques-unes. Mais les villas qu'on désigne généralement sous cette appellation se trouvent en fait surtout à Wépion, Profondeville-centre et du côté de Godinne…

Il n'y a que deux choses réellement lustinoises dont parle l'émission: la "promenade des chapelles", mais dont la réputation ne semble pas avoir dépassé très largement le village, et le groupe de joyeux cyclistes de "La vieille boucle lustinoise". Sauf que, l'émission pratiquant, semble-t-il de longue date, la technique des emprunts, celle-ci avait déjà été phagocytée il y a trois ans lorsque Le plus beau village avait présenté le village voisin de Crupet. Alors que cette vieille boucle-là est bien une spécialité locale de Lustin.

ET L’ÉDUCATION DANS TOUT ÇA ?

Bref, en tout cas à propos de ce petit village mosan, on a assisté samedi dernier à un méli-mélo qui a du faire dresser les cheveux sur leur tête à pas mal d'habitants de tous les villages dont les richesses ont été "volées" pour en faire profiter Lustin. Et pas sûr que les Lustinois auront été heureux de se voir attribuer toutes ces richesses qui ne leur appartiennent pas, alors que la nature et la simplicité de leur village en constituent, en fait, les premiers attraits.

La mission du service public de l'audiovisuel n'est-elle pas, comme le proclame le nouveau gouvernement de la FWB, d'abord d'informer et d'éduquer ? Éduquer en amusant, c'est encore mieux. Mais si éduquer devient raconter n'importe quoi pour promotionner un village qui n'a pas de caractérisques particulière (ou en tout cas pas celles-là), il est temps qu'on se pose des questions Boulevard Reyers. Chercher à être moins bruxellois, c'est parfait. Mais le faire en mettant une bonne partie de la vérité et des cartes de géographie administratives la tête en bas, ça, ça ne va pas…

Frédéric ANTOINE.

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(1) « Dans une immense boucle du fleuve et perché sur les superbes falaises des Rochers de Frênes, le village de Lustin jouit d’un panorama exceptionnel. Du sommet de ce massif rocheux, classé remarquable, vous découvrirez les plus beaux paysages de la Haute Meuse Namuroise.
Outre un « à pic » impressionnant de 80 mètres au-dessus de la Meuse, l’érosion du fleuve a laissé de magnifiques grottes et autres cavités  qui font le bonheur des spéléologues. Terre de cyclisme, ses coteaux sont l’objet de joutes entre grimpeurs. Village vivant rythmé pas ses fêtes et animations, Lustin est aussi l’endroit rêvé pour de magnifiques randonnées.
»

(2) http://www.lustin.be/village/index.php

04 août 2024

J.O. : stop à la breloque !

 

Tous les journalistes qui qualifient de "breloques" les médailles olympiques savent-ils ce qu'ils disent ?

C'est devenu une triste banalité : dès qu'il s'agit de trouver un synonyme au mot "médaille" dans un article ou un billet radio-tv, les journalistes francophones ont trouvé "le" mot qui convient : breloque. On le repère à tire-larigot dans toute la presse française, dans les médias audiovisuels de l'Hexagone… mais pas seulement. La presse belge n'est pas en reste. La DH, La Libre… utilisent parfois le terme. Dans Le Soir, il figure une vingtaine de fois depuis un mois… mais écrit en italiques. A la RTBF, on relève le mot à 68 reprises sur RTBF info… Bref, la breloque est à la mode.

Sauf que, selon le français courant, une breloque ce n'est pas une médaille. Qu'elle soit olympique ou autre. Selon le Larousse, c'est… un "Petit bijou fantaisie que l'on porte pendu à une chaîne, à un bracelet, etc.". Le Robert, lui, écrit : "Petit bijou de fantaisie que l'on suspend". Oui oui un petit petit bijou. Donc pas une médaille. Et, de surcroit, le plus souvent, un petit truc qui n'a pas de valeur, comme le précise le Trésor de la Langue Française qui parle de "Colifichet de peu de prix, petit bijou que l'on attache à une chaîne de montre, à un ruban, à un bracelet..."

PAS DE VALEUR ?

Pas de valeur, une médaille olympique ? Selon la RTBF elle-même, "Une médaille d’or des Jeux Olympiques (JO) de Paris vaut 862,57 euros, une valeur record, ressort-il d’une analyse sur la base des matériaux qui composent les médailles olympiques, menée par la plateforme d’investissement Saxo. Lors des JO de Tokyo, une médaille d’or valait 643,46 euros et 497,30 euros aux Jeux de Rio en 2016."(1). 

Sans valeur, une médaille de près de 900€ ? Si toutes les breloques avaient cette valeur-là, on n'en vendrait pas sur les marchés, les foires et dans les bazars des plages et des lieux de vacances. 900 €, c'est déjà le prix d'un beau bijou, non?

UN NOUVEAU SENS ? 

Mais voilà, qui connaît encore le sens du mot "breloque" ? Les vieux ronchons et les amateurs de la langue française. Mais pas les journalistes, qu'ils soient sportifs ou non. De là à se demander si les défenseurs du "vrai" sens du mot n'ont pas tort face aux torrents de breloques olympiques… 

Le Robert ne s'y est pas trompé, lui qui après avoir donné la bonne définition du mot cite comme premier exemple de phrase utilisant "breloque" un article de Ouest-France de datant des J.O. de 2021: "La journée était particulièrement argentée avec quatre breloques de ce métal et une de bronze.Ouest-France, 31/07/2021". 

Le meilleur moyen de créer la confusion… 

Car associer breloque et joyau olympique semble être né lors des précédents J.O. Et amplement utilisé lors des J.O d'hiver de 2022. Tant et si bien que le médiateur de radio France avait alors été saisi par des auditeurs outragés (2). La brave médiatrice leur avait donné raison, reprenant la réponse de Jean Pruvost, lexicologue, pour qui il s'agit d'un terme méprisant pour les athlètes et dont l'usage est inapproprié.

Mais voilà, les journalistes n'ont que faire des lexicologues… (même s'ils mettent le terme en italiques). 

Quand ils offriront à leur compagne ou compagnon un prochain bijou, par exemple un collier en diamants d'une valeur de 900€, ils seront heureux de s'entendre dire en retour : "Merci mon amour, quelle belle breloque! "…

 Frédéric ANTOINE.

(1) https://www.rtbf.be/article/jo-2024-la-medaille-d-or-des-jeux-de-paris-vaut-34-de-plus-qu-aux-jo-de-tokyo-celle-d-argent-vaut-84-de-plus-11415447 

(2)    https://mediateur.radiofrance.com/infos/breloque-ou-medaille/

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