Et si, pour une fois, on ne gardait pas juste pour soi les observations, les analyses, les études, les recherches, les commentaires… qu'on ne cesse de faire à titre académique, professionnel ou purement personnel ?
Regard médias
Il y en a des choses à dire sur les médias en Belgique…
05 mai 2020
Questions en Prime : Une prime pour les réponses
A compter du lundi 16 mars 2020, La Une (RTBF) a fait suivre son JT de 19h30 d'une émission en direct, de type "service aux téléspectateurs", où le journaliste Sacha Daout relaye auprès de spécialistes présents sur le plateau les questions que se pose le public (et les téléspectateurs) à propos du covid-19, du confinement, et de la crise liée au nouveau coronavirus. Certaines questions sont aussi posées par les téléspectateurs eux-mêmes. A coté d'invités en studio, la parole est donnée à divers acteurs de la société belge, via visioconférence.
L'émission se déroule normalement du lundi au jeudi, en n'empiétant pas sur le week-end.
Elle dérogera à ce principe fin avril, lors de l'annonce des premières mesures de déconfinement. Le programme est alors aussi diffusé le vendredi et le week-end, dans l'annonce de et pour rendre plus compréhensibles (ou discutables) les mesures annoncées le vendredi soir après 22h.
Le mercredi 25 mars constitue aussi une exception. Ce jour de la semaine étant celui où était prévu le lancement du nouveau magazine d'investigation de la rédaction de la RTBF, une partie de l'émission est remplacée par la diffusion d'un reportage, Dans l'ombre du virus. L'audience de ce jour est la plus faibles du programme, si l'on exclut celle du mercredi 16/3, jour où l'émission est particulièrement longue, et où RTL-TVI diffuse en parallèle un reportage : Coronavirus, la Belgique à l'arrêt.
De la mi-mars au 28 avril, l'audience moyenne de Questions en Prime a frôlé les 607.000 spectateurs quotidiens. Cette moyenne est à peu près identique au cours du mois de mars et du mois d'avril.
La courbe des audiences quotidiennes confirme ce niveau d'audience à peu près constant qui ne connaît que deux jours plus faibles et un jour avec un pic d'audience, celui-ci se situant le vendredi soir, avant la tenue de la conférence de presse du CNS annonçant les premières mesures de déconfinement. Le programme réunit alors près de 878.000 téléspectateurs, ce qui constitue une audience très élevée (à l'heure où ces lignes sont écrites, le CIM ne donne pas encore accès aux données en parts de marché permettant de mesurer à quelle part de l'ensemble de l'audience ce chiffre correspond).
Il est difficile de comparer l'audience moyenne avec les résultats d'ordinaire obtenus par La Une à la même heure, car l'émission ne correspond pas au format classique d'un programme de prime-time. Sa durée moyenne est de 22 minutes, ce format connaissant trois exceptions : le 18/03, où elle dure plus de 80 minutes (audience moyenne la plus faible enregistrée), le 25/03 (avec diffusion d'un reportage) et le vendredi 24/04, où elle participe pendant 46 minutes à la longue attente de la conférence de presse du CNS. On pourrait alors comparer l'audience de cette tranche avec celle des programmes courts de début de prime-time que La Une propose du vendredi au dimanche, mais là aussi la mise en relation serait discutable car ces jours sont, justement, ceux où l'émission n'est d'ordinaire pas diffusée.
A titre indicatif, on notera que l'audience moyenne du programme de prime-time de La Une au cours du mois de janvier (lundi-jeudi) était de 337.000 téléspectateurs. Soit un peu moins de la moitié du volume de l'auditoire que réunit en moyenne Questions en Prime.
Les données disponibles sur les parts de marché réalisées par l'émission ne concernent que la meilleure audience de chaque semaine. Ces jours où le programme a réuni la plus grande proportion de spectacteurs, la PDM du programme se situe entre 36 et 40%, et cette proportion croît en avril, semblant manifester l'accroissement d'intérêt que l'audience porte à une émission qui tend à clarifier, expliquer et faire comprendre, sans se faire le porte-parole des décideurs, et tout en conservant un esprit critique et un sens journalistique.
Frédéric ANTOINE
04 mai 2020
Quelle audience, les JT confinés !
Les JT du soir
L'audience des JT a battu tous les records pendant la crise du coronavirus.
Selon les données CIM, plus de 800.000 téléspectateurs (Live+Vosdal) ont fréquemment suivi les journaux télévisés du soir de RTL-TVI et de La Une au cours du mois de mars. Ces scores historiques sont beaucoup moins fréquents en avril, et est alors essentiellement lié aux moments des annonces de décisions du CNS sur la sortie du confinement.
De manière assez constante, le RTL Info de 19h a, comme à l'accoutumée, rassemblé davantage d'audience que le JT de La Une. Mais les résultats des deux chaînes se sont rapprochés.
En moyenne, entre le 6/3 et la fin mars, le 19h de RTL-TVI a été suivi par près de 808.000 spectateurs, et le 19h30 de La Une par environ 754.500 spectateurs.
Du 1er au 29 avril, l'écart s'est réduit entre les deux chaînes, la moyenne du journal du soir de RTL-TVI étant de 724 500 et celui du 19h30 de 722.000. En tenant compte de la marge d'erreur, on peut estimer que les deux JT ont réuni le même nombre de spectateurs.
En mars 2019, l'audience moyenne du RTL-Info 19h était de 601.000 personnes et celle du 19h30 de La Une de 472.000.
En avril 2019, ces audiences étaient de 531.000 pour RTL-TVI et de près de 420.500 pour La Une.
En mars 2020, l'audience moyenne du RTL Info 19h a donc été d'environ 200.000 spectateurs supérieure à 2019, et celle du 19h30 de La Une de près de 275.000.
En avril, les gains d'audience sont encore supérieurs. Le RTL Info 19h a comptabilisé en moyenne environ 193.500 spectateurs de plus qu'en 2019, et le19h30 de La Une près de 301.500. Ces résultats s'expliquent en partie au moins par l'absence cette année d'un effet "vacances de Pâques", qui diminue toujours l'audience moyenne de la télévision pendant cette période. Mais cet effet ne concerne qu'une partie du mois.
Les pics absolus d'audience des JT se situent en début de crise, lors de l'entrée en confinement.
Tout au long de cette période, les journaux télévisés de RTL-TVI continuent comme d'ordinaire à recueillir davantage de spectateurs que ceux de la RTBF. Mais celle-ci réalise parfois des audiences plus élevées que sa concurrente privée lors de moments liés à la communication de décisions du CNS.
Les JT de 13h
Sur le temps de midi, les JT de la RTBF réalisent d'ordinaire des résultats d'audience meilleurs que RTL-TVI. La chose est moins évidente pendant cette période de crise, les deux émissions d'information comptabilisant souvent un nombre de spectateurs presque équivalent (hormis les cas des dimanches, où RTL-TVI est traditionnellement plus suivie que La Une). En fin de période, l'audience des JT de 13h de RTL-TVI précède à de nombreuses reprises celle des JT de la RTBF.
En moyenne, entre le 6/3 et la fin mars, le 13h de RTL-TVI a été suivi par près de 390.500 spectateurs, et le 13h de La Une par environ 414.500 spectateurs.
Mais, du 1er au 29 avril, la moyenne du journal de 13h de RTL-TVI était de 410.000 spectateurs et celui de la RTBF de 384.000.
En mars 2019, l'audience moyenne du RTL-Info 13h était de 229.500 personnes et celle de La Une de 237.000.
En avril 2019, ces audiences étaient de 215.500 pour RTL-TVI et de près de 230.000 pour La Une.
En mars 2020, l'audience moyenne du RTL Info 13h a donc été d'environ 261.000 spectateurs de plus qu'en 2019, et celle du 13h de La Une de près de 177.500.
En avril 2020, RTL Info 13h a compté environ 194.500 spectateurs en plus par rapport à 2019, et le13h de La Une près de 206.500. Mais il faut là aussi tenir compte d'une absence de l' "effet vacances de Pâques" cette année.
La crise du coronavirus a attiré vers l'information des JT belges un nombre de spectateurs plus important que d'ordinaire, celui-ci augmentant souvent en moyenne de plus de 200.000 personnes par jour et par édition du journal télévisé. Il s'agit évidemment de moyennes, qui sont influencées par les chiffres élevés d'audience les jours où des événements importants se déroulent aux alentours de l'heure des informations. En mars et avril, RTL-TVI a accru par rapport à 2019 l'audience de ses JT de plus de 25%. A 13h, l'audience moyenne de RTL a augmenté de plus de 40% en mars à un peu moins de 50% en avril.
Pour la RTBF, la hausse d'audience du JT du soir et plus marquée encore: en mars elle est d'un peu moins de 40%, et avril d'un peu plus de 40%. A 13h, le gain d'audience est de plus de 40% en mars et en avril.
Les hausses d'audience sur le temps de midi peuvent être mise en relation avec l'état de confinement, qui invite davantage de personnes à regarder la télévision en journée. La même explication ne peut pas être envisagée de manière identique pour les JT du soir.
Frédéric ANTOINE
Conférence de presse ou de stress?
a) A communiquer à des journalistes un contenu complexe, impossible à réduire au texte d'un simple communiqué de presse, par exemple, afin que les journalistes se réapproprient ce contenu, le digèrent, le contextualisent, le vulgarisent, pour le transmettre ensuite à leurs usagers (lecteurs, auditeurs, téléspectateurs, internautes…).
b) A permettre aux journalistes, porteurs des interrogations de leurs usagers, de poser en leur nom des questions aux organisateurs, questions à la fois de compréhension, de précision, de contextualisation, mais aussi de contradiction, voire de controverse.
La conférence de presse relève d'une communication à deux niveaux, le journaliste-médiateur se situant au niveau médian du processus.
Un journaliste ne peut être le 'médiateur' de la communication d'organisateurs d'une conférence de presse que s'il en a lui-même saisi et compris tous les éléments.
Dans la panoplie des sources journalistiques, une conférence de presse est la (ou une des) matière(s) première(s) d'une production journalistique.
A qui s'adresse une conférence de presse?
Aux journalistes. A ceux qui vont relayer son contenu en se le réappropriant, contextualisant, nuançant, voire parfois en le contestant.
Que n'est pas (en général) une conférence de presse?
Un contenu clé sur porte transmissible en l'état aux destinataires finaux de la chaîne de l'information (lecteurs, auditeurs, téléspectateurs, internautes…).
A qui ne s'adresse pas une conférence de presse?
Au 'grand public' qui ne dispose ni des outils, ni du background, ni des éléments de contexte, lui permettant non seulement à terme de se réapproprier seul ce contenu présenté, mais surtout de l'assimiler en temps réel.
Quel est le virus qui tue actuellement les conférences de presse?
L'obsession de l'immédiateté, qui vise à réduire à néant l'intervalle de temps entre la collecte d'une information et sa transmission à son destinataire final. C'est-à-dire le rêve de supprimer le rôle de médiation du journaliste. Ce virus a été inoculé par les chaînes 'all news' (CNN en premier lieu) qui ont entrepris de retransmettre en temps réel (le fameux 'direct live') des points presse et des conférences de presse destinés précédemment à n'être accessibles qu'aux instances de médiation que sont les journalistes. Cette réduction de l'écart temporel est ensuite devenu une pratique courante, voire obligatoire, suite au culte de la banalisation du vécu en temps réel exercé par les réseaux sociaux.
A qui a été transmis le virus?
A tous les médias d'information qui n'envisagent plus d'instaurer un quelconque délai entre le moment où survient l'expression d'une information (notamment en conférence de presse) et sa communication à son audience. D'où la retransmission en temps réel, sans filtre, et parfois même sans traduction simultanée.
Mais le virus a aussi été transmis aux organisateurs de conférence de presse qui confondent désormais communication à des médiateurs professionnels et communication directe avec le grand public. Et qui offrent aux médias les moyens techniques de captation leur permettant de se passer de la médiation journalistique. Et leur garantissant ainsi un accès direct à l'audience, comme s'ils s'y adressaient directement. Alors que les codes utilisés restent ceux d'une conférence der presse.
On met ainsi sur le même pied 'information pour la presse' et 'communication à la Nation'. Ce qui n'a rien à voir.
La préoccupation des responsables de conférence de presse de les organiser 'à l'heure des JT', ou à l'heure d'émissions spéciales de prime-time conforte la banalisation de cette confusion, voire la rend inévitable.
Un commentaire?
On peut ajouter à cela que, même si la conférence de presse est destinée à des 'professionnels' et des 'médiateurs' patentés, les principes de base d'une bonne transmission de message y sont les mêmes que pour toute communication. Il s'agit de véhiculer un message clair, et donc le moins ambigu possible.
Ainsi, par exemple, tout utilisateur du powerpoint sait que le rôle de pareille projection n'est pas d'apporter une information autre que celle qui est au même moment présentée oralement. Au contraire, le powerpoint doit être en partie au moins redondant par rapport au contenu exprimé oralement, et il doit venir renforcer le oral, et non le perturber.
Assimiler des contenus divergents, voire dissonants, présentés en parallèle, et dans une mise en forme peu discernable, ne peut qu'entraîner confusion et incompréhension.
Si, de plus, trois images différentes convoquent en même temps le cerveau de l'audience, de gros doutes peuvent être exprimés quant à l'efficacité de l'exercice de communication…
• Frédéric ANTOINE •
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