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Regard médias

Il y en a des choses à dire sur les médias en Belgique…
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07 février 2021

INVITER LES SCIENTIFIQUES À ALLER SE RHABILLER, EST-CE LE RÔLE D'UN PRÉSENTATEUR D'UNE CHAÎNE ALL NEWS?

Est-il normal que, au début de son émission, un animateur d'une chaîne All News s'adresse directement aux scientifiques, et les invite en termes polis à aller se rhabiller? C'est en tout cas ce qui est arrivé près de chez nous fin janvier. Est-ce cela qu'un présentateur d'une chaîne consacrée à l'info est là pour donner son opinion ?

« Je m'adresse aussi pour terminer aux experts. Alors, messieurs les experts, ça fait un an que vous êtes sur tous les plateaux de télévision et y a rien qui a changé. Alors, s'il vous plaît, retournez dans vos laboratoires trouver nous une solution et laissez le politique qui est payé pour ça nous l'annoncer. » C'est ainsi que le présentateur (ou l'animateur, ou le journaliste?) d'une émission de LN24 a ouvert son programme le 30 janvier dernier. En termes plus un peu plus choisis, ce dernier a bien signifié aux chercheurs, aux médecins, aux épidémiologistes… de retourner à leurs casseroles et de ne plus nous embêter. Qu'à titre privé, on puisse exprimer de telles opinions est une chose. Mais que cela soit affirmé, en ouverture de programme, par celui qui le présente, peut poser davantage de questions. (le texte complet figure en fin d'article)

D'accord, l'émission en question s'appelle un "Late Show", et essaie peu ou prou de s'inspirer des talk-shows de fin de soirée des télévisions américaines. Mais, dans le cadre de l'émission précitée, cela veut-il dire qu'on n'y exercice pas le journalisme, et que la pratique déontologique appliquée dans l'ensemble des autres programmes de la chaîne, 100% info, n'est ici pas de mise? La personne qui anime cette tranche horaire est-elle dispensée des règles qui régissent le monde de l'information? 

Une question de statut

Aux USA, les présentateurs des late shows ne sévissent pas sur des chaînes d'info, et ils animent clairement leur show dans le contexte d'un programme de divertissement. Ils y jouent un rôle mêlant la fonction d'animateur-présentateur et celui d'humoriste. Ils sont là pour être des pince-sans-rire, pas des journalistes. Le stand-up qu'ils réalisent en début de chacun de leurs shows est d'ailleurs une sorte de sketch humoristique, souvent grinçant, certes basé sur de l'actu, mais dont tout le monde maîtrise le fonctionnement et les règles. Le cadre et le contexte se prêtent à ce genre d'exercice. On n'a pas là affaire à une sorte de billet d'opinion présenté en pré-programme, avant le générique de l'émission. Le québécois Dan Gagnon, lorsqu'il animait le Dan Late Show sur la RTBF, était dans cette veine américaine. Ici, c'est autre chose.

D'accord, la pratique du journalisme inclut l'éditorialisation. Et, dans les médias écrits, l'expression d'opinions par des journalistes-éditorialistes est une tradition bien ancrée. Mais est-on ici dans ce cadre-là? Est-on face à un éditorial, qui pose le pour et le contre, analyse et puis conclut par l'expression d'un avis? En entendant les propos reproduits ci-desus en ouverture de ce programme, le spectateur ne peut-il pas se demander : « Mais qui est ce personnage pour prononcer de tels propos ? D'où vient-il pour parler ainsi aux scientifiques ? Pourquoi se permet-il ce ton-là ? Sur quoi se base-t-il, par exemple, pour affirmer que rien n'a changé ? » Le présentateur de ce programme a-t-il sur la chaîne un statut d'éditorialiste? Le générique de l'émission précise-t-il que les propos du présentateur n'engagent que lui-même et pas l'identité éditoriale de la station? Sauf erreur, cette émission n'a pas de générique…

Une question de genre

D'accord, le présentateur de ce show ne manque pas de talent. Dire qu'il ne pratique ce genre d'exercice que depuis septembre dernier, et qu'il n'avait auparavant pas fréquenté les cénacles de l'audiovisuel, démontre une incontestable capacité à assimiler les codes télévisuels en un temps record et un art de la présence à l'écran que certains doivent lui envier. Mais cela ne démontre-t-il pas que ce show s'inscrit dans un registre étranger aux formats conventionnellement utilisés sur une chaîne consacrée à l'information? Si l'on se branche sur une all news, c'est parce qu'on a confiance en elle, en la qualité et en la véracité de l'info qu'elle va délivrer. Comme le disent les sociologues des médias, c'est là-dessus que repose contrat de lecture qui lie le spectateur et la station. Le programme évoqué ici correspond bien à ce qu'on appelle un talk show, c'est-à-dire un programme ‘à invités’ où tout tourne autour de la personnalité du présentateur. Sans lui, l'émission n'existerait pas. Mais ce n'est pas un talk-show d'information comme, par exemple, C'est pas tous les jours dimanche sur RTL-TVI.

La question de fond est donc de savoir si, sur une chaîne d'infos, le mélange des genres est de mise, le spectateur n'ayant qu'à se débrouiller seul devant la diversité des codes sur lesquels fonctionnent des programmes de nature différente. Une all news, ce n'est pas une télévision thématique comme les autres, où tout est bon pourvu que l'audience suive. C'est un maillon de la chaîne des connaissances qui nous permettent notre être au monde.

D'accord, on dira qu'il suffit de faire confiance à l'intelligence du spectateur, bien formé par une éducation aux médias tellement pratiquée en Belgique que le monde entier nous l'envie. N'empêche. Quand on entend le présentateur d'une émission d'une chaîne info affirmer tout de go sa propre opinion, en invitant les scientifiques à retourner dans leurs labos et foutre la paix au monde, ça cause comme un malaise…

Frédéric Antoine

Pré-Ouverture de l'émission du 30/01/2021

"Je m'adresse à vous les jeunes, pas ceux qui sont avachi devant leur télévision. Avec Netflix, les GAFA, YouPorn, Deliveroo, mais à ceux qui se rebellent, aux résistants. A nos jeunes qui aux Pays-Bas se rebellent. A ceux qui veulent se rebeller ici, en Belgique. Je devrais pas le dire, je devrais pas vous conseiller de le faire. D'ailleurs, je vous conseille pas de le faire. Mais comme dirait Frank Vandenbroucke, je ne vous l'interdis pas parce qu'on comprend votre mécontentement. Je m'adresse aussi aux pontes de l'Europe et du fédéral. Messieurs, nos séniors ont cotisé 40 ans pour se retrouver depuis un an dans une prison. Prison dorée peut être, mais une prison tout de même. Notre classe moyenne est à L'a-go-nie. Elle n'existera peut être plus après cette crise et c'est elle qui fait tourner la baraque. Je m'adresse aussi pour terminer aux experts. Alors, messieurs les experts, ça fait un an que vous êtes sur tous les plateaux de télévision et y a rien qui a changé. Alors, s'il vous plaît, retournez dans vos laboratoires trouver nous une solution et laissez le politique qui est payé pour ça nous l'annoncer. Et pourquoi pas un jour de bonnes nouvelles. Mesdames et messieurs, bienvenue dans le …"

22 janvier 2021

L'IN SITU DANS LES JT: VOYAGE EN ABSURDIE

 
« Nous rejoignons tout de suite notre journaliste sur place… » Ce jeudi, on a encore vécu un beau cas d'inutilité de l'usage de l'in situ dans un journal télévisé. Une maladie, elle aussi, devenue universelle et fort contagieuse. 
Dans ce cas-ci, on espère que l'envoyée spéciale n'en aura pas 'profité' pour attraper un gros refroidissement.

Il pleuvait sans cesse sur le bâtiment Charlemagne, ce soir-là. Et la journaliste était la, souriante, épanouie ravie, ruisselante Sous la pluie… Mais qu'avait-elle à y faire? Ce jeudi, à la vingtième minute de son Jt, la présentatrice annonce qu'il y a un « Sommet européen en cours à ce moment » et que « les dirigeants discutent via vidéo-conférence », notamment à propos des mesures à prendre contre les nouveaux variants de la covid. 

Ce lancement est suivi d'un billet assuré par une journaliste, en direct depuis les environs du rond-point Schuman et de l'extérieur du bâtiment de la Commission européenne. Belle occasion d'être-là au cœur de l'info se déroulant en direct. Non seulement, comme c'est généralement le cas, l'envoyé·e sur place n'est pas alors plus au courant des dernières nouvelles concernant son sujet que l'anchorwoman présente en studio. Mais ici, elle n'a, de plus, aucune raison de se trouver à cet endroit, sans le moindre parapluie, alors que l'averse débute. 

En effet, comme l'avait bien précisé sa collègue, le Sommet se déroule « en vidéo-conférence ». A moins qu'un des chefs d' État ou de gouvernement n'ait poussé le vice jusqu'à se rendre à Bruxelles, dans le bâtiment de la Commission pour s'y installer avec son PC, ou à moins qu'Alexander De Croo ait préféré passer la soirée au Berlaymont plutôt qu'à son bureau du 16 rue de la loi (ou dans le cocon de son domicile privé), il n'y a au moment-même aucun responsable européen aux alentours du rond-point Schuman. La journaliste est en train de se tremper sous la pluie totalement inutilement. Et, à la voir, elle n'en semblait pas particulièrement heureuse.

Si beau à voir

Bien sûr, il eût été plus simple de lui faire présenter son billet dans le studio du Jt, sauf que cela aurait, une fois de plus, imposé pour tous le port du masque, qui cache un peu l'expression des visages et étouffe légèrement le son des voix. Mais, à part cela, c'était la solution idéale. Mais, voyez-vous, ça fait vieille télé tout ça. Pire, on dirait même de la radio! Ce vieux média dépassé où les journalistes spécialisés lisent leurs billets en direct dans le journal parlé, à côté du présentateur (ou, souvent, l'enregistrent à l'avance). Ah, ce n'est pas eux qu'on enverrait se mouiller ou se geler l'une ou l'autre partie du corps pour les beaux yeux de l'image! C'est si beau de voir ces femmes et ces hommes sur le lieu même d'un événement, prêts à le faire vivre en direct live à leurs spectateurs. N'est-ce pas ce qui fait la quintessence de l'info télé, ce que jamais Netflix ne pourra proposer? Sans conteste, une belle mise en décor (ce que signifie en fait l'expression in situ). Toutefois, ces mises en scène en extérieur apportent-elles quelque chose de plus au contenu de l'info? Dans 99% des cas, strictement rien.

 
Ces constructions médiatiques sont juste de l'habillage, de la construction de réel. Et de l'illusion. De la production d'impressions. Celle d'une rédaction et de super-journalistes toujours sur la balle, et bien sûr celle d'être aux premières loges. C'est-à-dire devant un bâtiment où rien ne se passe, sur le trottoir du carrefour le plus proche de l' Élysée où rien ne se passe non plus, ou devant les grilles érigées autour du Capitole où il y a juste deux badauds en train de prendre une photo
 
Juste du exemple

Évoquée en tête de ce texte, cette prestation nocturne et pluvieuse sur un lieu où l'actualité ne se déroulait pas, et la compassion qu'elle inspire, nous ont poussé à écrire ces quelques lignes. Mais elles auraient déjà pu être rédigées mille fois depuis la création de ce blog. Ne serait-ce que pour rendre hommage au courage et à la détermination (ou à l'obéissance?) de ces journalistes qui ne cessent de mettre leurs nerfs, leur santé et leur ouïe en danger pour faire croire à leur audience qu'ils étaient bien au cœur de l'info.

Parfois, cela a tout de fois tout son sens. Comme lorsque à la 33ème minute de ce même Jt, quand la présentatrice a redonné l'antenne à l'envoyée spéciale se trouvant au milieu d'une ruelle sombre, présentée comme le « Palais de justice de Liège ». Là, l'information de l'inculpation d'un homme d'affaires liégeois célèbre venait de tomber en plein journal télévisé. Bravo pour le réflexe. Mais, pour une séquence comme celle-ci, combien d'autres dont on ne peut que discuter de l'utilité (de même, dans certains cas, que le coût). Mais, voyez-vous, c'est cela l'info du XXIe siècle. De l'image, du show, et de la communion en temps réel. Avec CNN, les Américains avaient donné le ton depuis les années 1980. Désormais, toute la planète est à l'unisson. Pour le meilleur. Et souvent pour le pire. Ce ne sont pas les chaînes info qui prouveront le contraire.

Frédéric ANTOINE.

11 janvier 2021

LA HIÉRARCHIE DE L'INFO PEUT ÊTRE ÉTRANGE DANS UN JOURNAL PARLÉ. PETITE ÉTUDE DE CAS.

(Image d'illustration)
"Changer de ton pour obtenir une meilleure adhésion du public aux règles sanitaires, c'est le but des Covid Boys, deux hommes qui sillonnent les rues de Bruxelles pour attirer l'attention des passants sur ce thème. C'est une initiative privée. La ministre française de la Défense, Florence Parly, s'inquiète de la résurgence de l'Etat islamique en Irak et en Syrie, alors que les USA projettent de retirer 500 soldats de la zone." Tels étaient les deux titres du journal parlé de La Première, ce dimanche 10 janvier à 17h…

 Ce journal parlé de 17h de La Première, d'une durée d'un peu moins de 9 minutes comprenait neuf infos, dont certaines plutôt… étonnantes. Face au brouhaha et aux convulsions de l'actu dans le monde et en Belgique, il commençait en effet, comme l'annonçait le premier titre du sommaire, par un sujet d'une actualité brûlante : dans les rues de Bruxelles, depuis deux mois, deux jeunes hommes esssaient de sensibiliser les passants à la prophylaxie anti-covid. Ce sujet est essentiellement constitué  d'un reportage, d'une durée d'environ une minute trente. La deuxième info, après avoir fait une très rapide allusion à la tempête de neige que connaissait l'Espagne, concerne… le Japon, lui aussi touché par des intempéries.

La troisième info évoque une déclaration faite à France Inter par la ministre française de la défense à propos de la résurgence de la présence de Daesh au Moyen-Orient. Elle est  un principalement composée d'un extrait de déclarations de la ministre sur la radio publique parisienne. Restant en France, le titre suivant traite du variant anglais du covid présent à Marseille là aussi à partir de propos : ceux tenus par "la première adjointe au maire de Marseille chargé de la santé".

 On passe ensuite en Belgique, où une info sur un enlèvement à Hal est brièvement traitée, avant que l'on s'attarde sur l'histoire d'une jeune fille qui a décidé d'élever des chèvres et d'en exploiter le lait. Cette information très originale fait l'objet d'un long reportage. Puis comme le veut la traditionnelle hiérarchie journalistique, les infos sportives clôturent le contenu du journal. Celles-ci, au nombre de trois, survolent trois sports et incluent l'annonce du décès d'Hubert Auriol.
 
La hiérarchie de l'info de ce journal parlé débute donc par un sujet hors actualité, mais que l'on peut considérer comme "une nouvelle positive desociété". Il accorde une place appréciable à l'étranger, puisque trois sujets sur neuf (et trois sur six hors sports) concernent l'international. 
 
Choix et hiérarchie
 
En étudiant la répartition du temps consacré à chaque sujet, d'intéressantes observations se dégagent.
Deux sujets occupent en effet à eux seuls 42% du temps de cette émission d'informations sensée faire le tour des nouvelles de Belgique et du monde : l'action des deux Covid-boys bruxellois et le projet d'une Gerpinnoise de 18 ans qui compte se lancer dans l'élevage de chèvres (voir ci-dessous la retranscription du contenu de ce sujet). Le succès sportif de Wout Van Aert et les déclarations de la ministre français suivent en ordre d'importance, ainsi que le sujet sur la variante anglaise du covid à Marseille. L'international représente ainsi 30% du temps de ce JP.

Celui-ci comprend bien quelques-unes des infos diffusées ce jour-là entre 13 et 17h par les fils infos de médias comme la RTBF elle-même ou Le Soir (la RTBF faisant de la jeune chevrière un de ses titres), mais une comparaison (voir tableau ci-dessous) confirme que ce journal parlé était plutôt original. Certaines nouvelles des fils info se retrouvent dans le JP (notamment en sports) de fin d'après-midi, mais celui en comprend d'autres, et les hiérarchise autrement. Une autre manière de faire de l'info radio? Assurément. Un nouveau style pour La Première, loin des nouvelles institutionnelles et de la politique ? Peut-être. Ou un petit effet contamination du style d'infos d'autres chaînes (ou stations) ? A réflechir.

Frédéric ANTOINE.
 
__________
 
Sujet "La jeune chevrière"

Speaker 2: Elle s'appellent Marguerite, Sarah, Belle. Ou encore Nutella, ces petites chèvres. C'est le point de départ du pari professionnel de Chloé Clémerie, qui va se lancer dans la fabrication du fromage de chèvre.

Speaker 1: Il y a deux ans, j’étais à Ciney à l'école et j'ai dû aller en stage de fabrication de fromage et j'adorais faire du fromage. J'ai voulu commencer à en produire, mais je ne voulais pas prendre de vaches, donc j'ai choisi les chèvres.
Speaker 2: Le monde agricole, pour Chloé, c'est loin d'être un monde inconnu. C'est soutenue par ses parents qu'elle s'est installée dans la ferme familiale. Sa maman,Anne Clémerie.

Speaker 3: oui oui on est fiers, surtout qu'elle n'a que 18 ans et qu'elle veut se lancer là-dedans. On est très fiers d'elle. Quand elle nous en a parlé, on l'a suivie tout de suite dans son projet. On va essayer que ça fonctionne au mieux.
Speaker 2: Les premières traitent des chèvres, c'est pour fin mars et ce sera alors à Chloé de jouer et de proposer toute une gamme de produits.

 pour de la glace, du fromage frais principalement.
Speaker 1: 
Du yaouet, de la glace, du fromage frais principalement. Et on va ouvrir un petit magasin où on veut aussi vendre des produits locaux d'autres producteurs.
Speaker 2: Vente à la ferme, mais aussi, via une coopérative, sont déjà prévues. Autre projet proposer dès cet été : des glaces au lait de chèvres locales aux promeneurs qui se baladent sur le Ravel, juste à côté de la ferme.

_____________
 
Fil info du Soir et de La Première, dimanche 10/01/2021 de 12h50 à 17h00
 

05 janvier 2021

Bilan TV 2020: l'audience différée profite à TF1 et aux télé-réalités. Mais aussi à Questions en Prime

En tenant compte de l'audience jusqu'à sept jours après après la diffusion linéaire, le Top 2020 (1) des audiences télé ne change pas fondamentalement: ce sont toujours les Jt qui ont eu la cote l'année passée. De même que Questions et Prime. Mais, hormis l'info quotidienne, ce sont Les enfoirés, L'amour est dans le pré, Mariés au premier regard ou Top Chef, qui ont été pas mal regardés après leur jour de diffusion.

Les Jt, même spéciaux, ça ne se regarde pas beaucoup après leur jour de diffusion. Normal : l'info se périme vite, donc la date de validité de chaque Jt est fort proche du moment de sa production. Comme les Jt avaient cartonné en audience J+1, ils font évidemment la même chose en J+7. On retrouve dès lors dans ce Top annuel un classement identique à celui des audiences (presque) en temps réel, avec la domination des Jt et des éditions spéciales, et une présence de Questions en prime.

Conséquence logique de ce qui précède, les différences entre les scores d'audience J+1 et  J+7 sont presque nuls (2), et en tout cas sans réelle signification.

Si l'on enlève le Jt mais que l'on conserve Questions en prime (et en tenant compte de la remarque méthodologique faite à la note 2), on retrouve de nouveau une situation à peu près comparable en J+7 et J+1: la plupart des mêmes émissions ont dans les deux cas réalisés des scores fort proches. (3)
 
Enfoirés et télé-réalités 
 
 Si l'on retire Questions en prime, la situation change quelque peu.
On voit en effet entrer dans le classement des meilleures audiences un programme de TF1 (Les enfoirés), et des émission de RTL-TVI (L'amour est dans le pré et Mariés au premier regard) qui ne figuraient pas dans le Top 20 que nous avions réalisé sur les audiences J+1, ou comme Top Chef, qui n'était présent qu'à une occasion dans le classement J+1, et qui occupe ici de nombreuses places. 
Le film Ni juge ni soumise, diffusé par la RTBF, n'aurait pas tout à fait dû figurer dans ce graphique, car il occupe la 21e place de ce classement, mais nous l'y avons intégré pour son caractère très significatif pour une analyse des usages d'audience entre J+1 et J+7. Comme Les enfoirés ou les télé-réalités de prime time de RTL-TVI, ce film n'a pas réalisé des audiences remarquables au moment de sa diffusion tv ou des heures qui ont suivi. C'est sur la distance que son auditoire a crû. Les enfoirés ou Ni juge ni soumise sont de vrais programmes de stock : on pourra encore les regarder plusieurs semaines, voire plusieurs mois après leur diffusion, ils n'auront pas pris une ride. Ce n'est pas tout à fait la même chose des télé-réalités et ses variantes de type 'compétition' de RTL-TVI et M6 dans la mesure où il ne s'agit pas là d'œuvres uniques, mais bien de prototypes reproduits au cours de de plusieurs épisodes. Leur échéance de validité de vision se situe donc bien quelque part : à la fin de leur semaine de diffusion, avant l'arrivée de l'épisode suivant.
Le programme qui bénéficie le plus de ce gain d'audience différée est sans conteste le grand show annuel de divertissement de TF1 au profit des Restos su Cœur, qui récolte au-delà de 200.000 spectateurs de plus en différé par rapport à sa diffusion linéaire. Résultat d'autant plus marquant que ce programme a été émis avant le confinement. Idem pour le portrait de la juge bruxelloise Anne Gruwez par Jean Libon et Yves Hinant, qui gagne près de 150.000 personnes au cours de la semaine qui suit sa diffusion. L'amour est dans le pré (2 épisodes à + 100.000 spectateurs), par contre, a été diffusé lors de la fin du second confinement, et en période de post-confinement. Marié au premier regard et Top Chef sont, eux, des programmes du premier confinement. Tout comme le show de François Pirette, dont nous avions relevé la relativement moyenne performance lors de sa diffusion linéaire, et qui remonte ici dans le classement. Les magazines d'info de RTL-TVI ne comptabilisent qu'une audience supplémentaire assez limitée, de même que la série docu-fiction Appel d'urgence. Quant aux matchs de foot, on les regarde très peu après coup. C'est bien sur le vif que l'émotion de l'exploit captive le spectateur.
 
Frédéric ANTOINE.

 

(1) Pour le J+7, l'analyse n'a comptablisé les résultats que jusqu'au 22/12. Pour rappel, il en est à peu près de même pour les J+1

(2) L'étude ayant été menée à partir des résultats publics du CIM, elle repose pour le J+7 sur le classement des meilleurs résultats hebdomadaires, dans lesquels ne sont retenus pour les émission quotidiennes que leur meilleur score sur la semaine. Pour les Jt, ce défaut méthodologique est compensé en partie par le fait que les éditions spéciales sont comptabilisées séparément. Toutefois, comme le démontre le graphique, il y a des jours pour lesquels la comparaison est impossible, et qui ne figurent donc pas dans le premier graphique présenté dans ce texte.

(3) Pour les commentaires, cf. un article précédent analysant ce type d'audience.

02 janvier 2021

Bilan Tv 2020 : hors info, RTL TVI truste les premières places

 L'info a dominé les audiences 2020, nous l'avons déjà écrit (1). Mais si l'on retire les Jt, quelles ont été les meilleures audiences de l'année? Outre l'émission Questions en prime, qui est sa doute "la" révélation de ces derniers mois, le foot et les magazines de RTL ont attiré le plus de public. Sans Questions en prime, les audiences se diversifient. Et la chaîne privée emporte la mise.

C'est un peu l'OVNI télévisuel de 2020, cette émission Questions en prime, programme entre le talk-show et l'émission-service, à durée variable d'édition en édition et à la programmation elle aussi instable selon les jours de la semaine et les périodes. Mais toujours avec le même journaliste-présentateur immuable, tellement bien installé dans le programme qu'il a ensuite aussi présenté le JT, sur le même ton que celui de 'son' émission spécial Covid. Déjà, dans notre Top 20 des audiences de tous les programmes de l'année (2), Questions en prime figurait sur la liste. Si l'on retire de ce relevé les JT, qui trustaient ce classement exhaustif, le succès du programme se confirme. Preuve d'une attente constante du public pour de l'info pratique et concrète à propos de la pandémie.

Questions en prime occupe 8 places parmi les 20 émissions hors JT les plus regardées en 2020 (3), c'est-à-dire ayant comptabilisé plus de 650.000 téléspectateurs. La plupart de ces bons scores sont réalisés pendant le premier confinement, mais on relève aussi parmi ce Top 20 deux émissions de fin octobre.  Il faut par ailleurs pointer les deux éditions de Jeudi en Prime, programme qui lui aussi suit la diffusion du Jt du soir, et dont les éditions du 22/10 et du 5/11 ont, elles aussi, réalisé de fort bons scores (interviews de la ministre Caroline Désir et du président de l'Absym Philippe Devos). Ces programmes quasiment imbriqués dans le Jt de La Une mis à part, la RTBF ne réalise qu'un seul autre score de Top 20 : pour la diffusion d'un match de foot de l'équipe nationale. Au total, la chaîne publique occupe 11 des 20 meilleures audiences…

RTL-TVI (en rouge sur le tableau) a l'habitude de faire suivre son Jt de 19h30 de magazines d'info diversifiés. Dans ce classement, Face au juge confirme ses succès antérieurs, en plaçant 3 éditions dans le Top 20, lors des trois semaines de mars marquant le début du confinement. Un numéro de Enquêtes, daté de fin mars, figure aussi dans ce hit-parade des audiences, de même que l'originale émission Belges à domicile, que la chaîne avait initié en début de premier confinement etQuestions en prime et où se jouait de belle manière la complicité entre le public à domicile et les animateurs de la station, eux aussi confinés (4). Deux matchs de foot des Diables complètent le tableau.
 
RTL-TVI presque partout

Si on retire de ce classement le "cas" que constituent Questions en prime et Jeudi en Prime, la configuration du jeu se modifie fortement : la RTBF (en bleu) disparaît quasiment de ce nouveau Top 20, dont presque toutes les places sont trustées par la chaîne privée (en rouge).
Dix-huit places sont 20 reviennent alors à RTL-TVI, à la fois pour ses magazines post-Jt (Face au juge [4] et Enquêtes [5]), mais aussi pour des programmes de prime time de type rélé-réalité (Top Chef [2] et la sérié docu-réalité Appel d'urgence), pour un divertissement : le show de Pirette. La première audience de ce classement est occupée par un match de foot, et la chaîne réussit à placer cinq émissions du même type dans ce Top 20.

Un peu mieux qu'en 2019, covid oblige
 
Ces résultats sont-ils exceptionnels? Impossible bien sûr de faire une comparaison pour Questions en prime et Jeudi en Prime. En 2019, Face au juge figurait aussi dans les meilleures audiences de l'année (en 5e place), avec 747.800 spectateurs (J+7). Cette année, même en mesure J+1, son meilleur score est plus élevé : 776.876 personnes. Il y a un an, la meilleure édition d'Enquêtes avait attiré 598.000 personnes (J+7). Cette fois, le score le plus haut du magazine en J+1 est déjà de 704.797, soit plus de 100.000 spectateurs de plus (et ce, donc, sans compter les visions différées). L'épisode le plus regardé d'Appel d'urgence (J+7) s'élevait à 638.300 spectateurs.  Cette année, en J+1, le résultat est un peu plus faible: 604.950. Si l'on regarde les chiffres J+7, cette audience monte en 2020 à 617.637 personnes. Soit toujours moins que l'année précédente. François Pirette, qui ne figurait pas en 2019 dans le Top 20 du CIM, avait alors accueilli 564.700 spectateurs (J+7) à son meilleur show. Cette fois, en plein confinement et en mesure J+1, il a fait un tout petit peu mieux en rassemblant 585.286 amateurs et amatrices de son humour. Mais son spectacle s'est fortement rattrapé en audience différée : en J+7 son show 2020 compte au total 639.879 spectateurs, au-delà 50.000 de plus par rapport à l'année précédente.
 
Ces bons scores 2020 ont évidemment été boostés par la covid. Les émissions dont l'audience 2020 est plus faible que par le passé peuvent donc être considérées comme de véritables échecs.
 
Frédéric ANTOINE


(1) Voir texte du 31/12/2020.

(2) Idem.

(3) Mesure audience J+1, avec arrêt du comptage au 29/12.

(4) Pour rappel, ce programme court a peut-être réalisé d'autres très bonnes audiences mais sa durée étant variable, le CIM n'a pas pris en compte les programmes courts.

(5) En 5e place selon le classement CIM qui n'applique pas la même méthodologie.

31 décembre 2020

L'info en tête de toutes les audiences en 2020. Petit classement par chaîne

 C'est l'info qui a réalisé les meilleurs scores d'audience tv toutes catégories cette année en Belgique francophone, crise de la covid oblige. Plus d'un million de personnes ont suivi l'émission ayant eu la plus forte audience. Avec La Première-RTBF sur la première marche du podium. Cela faisait longtemps qu'un Jt n'avait pas rassemblé le plus grand nombre de téléspectateurs. Petit regard général, et chaîne par chaîne.

En 2020, les vingt meilleures audiences de la télévision en Belgique francophone (1) concernent toutes des journaux télévisés du soir de La Une et de RTL-TVI. Le Jt de La Une du 17 mars, moment du premier Conseil National de Sécurité (CNS) annonçant l'entrée en vigueur du premier confinement, bat tout les records, avec près 1.063.000 spectateurs (live+J+1), et près de 1.067.000 si l'on tient compte de l'audience différée J+7. Les autres audiences les plus importantes des Jt dépassent les 900.000 spectateurs. Dans ce Top 20, si les infos de la RTBF occupent les deux premières places, elles ne représentent au total que 7 meilleurs scores (en bleu sur le graphique) sur 20, alors que RTL-TVI en compte 13 (en rouge sur le graphique).

Les deux Jt les plus suivis (sur la RTBF) sont ceux des deux jours-clés de l'année. L'audience la plus élevée est celle du soir du premier CNS. Le deuxième score est celui du 30 octobre, soit lors de la conférence de presse du Comité de concertation qui annonce la mise en œuvre du deuxième confinement. Mais, ce 30 octobre mis à part, toutes les audiences les plus élevées de l'année se situent lors du premier confinement. Dans ce Top 20, on ne retrouve qu'un seul autre Jt lié au deuxième confinement : en 17e position, celui de RTL-TVI, le 4 novembre.

Une bonne première audience, mais…
 
Depuis les décennies, les Jt réalisent toujours de très bonnes audiences en Belgique francophone, et se placent le plus souvent en tête des audiences journalières. D'ordinaire, ils ne sont parfois détrônés que par l'un ou l'autre blockbuster, le spectacle d'un humoriste
 local ou un événement sportif à portée nationale. Dans les cases de tête 2020, ce n'est pas le cas (2). Afin de réaliser une comparaison équitable, nous avons situé l'audience J+7 de l'émission la plus regardée en 2020 par rapport aux meilleures audiences relevées par le CIM dans ses classements annuels antérieurs.

Même si le Jt du jour d'entrée en confinement a cette année rassemblé un nombre impressionnant de spectateurs, il ne constitue pas la meilleure audience de la décennie. Entre 2010 et 2020, ce sont les retransmissions de compétitions footballistiques qui ont, le plus souvent, réuni le plus grand nombre de spectateurs. Outre plusieurs matchs de foot, même la première diffusion du film Bienvenue chez les Chtis sur RTL-TVI a fait mieux que le Jt du 17/03/2020. Ce n'est qu'à trois reprises que l'info a occupé la première place des audiences de l'année selon le CIM : en début de décennie, en 2011 et 2012 (avec des Jt de RTL-TVI) et cette année.  

Par ailleurs, même si le Jt de La Une du 17/03 est en tête du classement en nombre de spectateurs, il n'avait réalisé 'que' 48% de parts de marché, alors que les années où le Jt de RTL-TVI était en tête des audiences, il comptabilisait 50% de PDM, soit moins que les films de Dany Boon (entre 55 et 60% de PDM) et, bien sûr que la plupart des matchs de l'équipe nationale. Mais davantage aussi que Guihome, dont le show n'avait réussi à attirer 'que' 40% de l'auditoire présent (ce qui n'était toutefois pas mal pour quelqu'un d'encore inconnu quelques dizaines de mois plus tôt).

Chaîne par chaîne…

Sur La Une, 9 des 10 meilleures audiences 2020 (J+1) sont réalisées par des Jt et des éditions spéciales du Jt, la dixième place ayant été obtenue par l'édition du magazine covid Questions en Prime du 24 avril.

Hormis l'édition spéciale du Jt du 30/10, tous ces autres résultats ont été obtenus lors du premier confinement.

Sur RTL-TVI, même topo que sur La Une. Là aussi, les meilleures audiences  (J+1) sont celles du Jt de 19h, une seule édition spéciale de ce Jt figurant dans le Top 10, celle de la veille de l'annonce du confinement lors du CNS du 17 mars.
8 des 10 meilleures audiences sont liées au premier confinement. En 8e et 10e place du classement, on compte deux Jt d'automne: ceux des 28/10 et 4/11. 
 
Cet intérêt pour l'info est bien sûr l'apanage des deux chaînes premium du paysage audiovisuel belge francophone. Mais pas que: sur TF1, les Wallons et les Bruxellois ont pas non plus boudé l'info. Toutefois, ce n'est pas dans ce domaine que la version locale de la chaîne française a attiré le plus de Belges.
L'audience (J+1) 2020 la plus élevée de TF1 en Belgique est en effet, comme souvent, celle des… Enfoirés, dont il faut souligner que la diffusion a eu lieu avant le début du premier confinement. On n'ose imaginer quelle quantité de fans le programme aurait comptabilisée si l'émission avait été proposée après le 17 mars. Derrière ce show devenu culte même auprès des jeunes adultes, le Top 10 des audiences de TF1 se concentre uniquement autour des deux séries de Koh-Lanta proposées cette année. C'est la série diffusée lors du premier confinement (L'île des héros) qui occupe le plus de places dans ce Top 10 : 6 contre 3 pour les 4 Terres, programmé pendant le deuxième confinement. Les audiences des 4 Terres sont aussi en règle générale moins élevées que celle des Héros, qui remettait en selle certains 'aventuriers' célèbres.

2020 a été marquée par un changement de dénomination de La Deux, supposé correspondre à une redéfinition du contenu de la chaîne.
Si l'on associe dans un continuum La Deux puis Tipik, les meilleures audiences des deux dénominations sont plutôt… du côté de La Deux (7/10). La plupart des résultats de ce Top 10 sont liés à l'émission Le grand cactus, que celle-ci soit diffusée sur La Deux (4) ou sur Tipik (3). Si la deuxième meilleure audience de l'année pour la chaîne est celle du Grand cactus spécial confinement, la première place revient à l'émission proposée après le deuxième confinement (17/12). Les autres places du Top 10 sont occupées par des films 'culte', The Bodyguard était proposé avant le premier confinement, Dirty dancing pendant le premier confinement et Jurassic World après le deuxième.

Un petit regard sur La Trois, juste pour l'anecdote. En raison des faibles audiences réalisées, nous ne retiendrons que cinq programmes. Deux classiques du cinéma y réalisent les deux audiences de plus de 100.000 spectateurs.
 
Sur Club RTL, tous les bons résultats d'audience sont le fait de diffusions de matchs de foot. Seule exception : la dixième place du classement.

 
Sur Plug, toutes les audiences les plus hautes sont liées à des diffusions de films. En bas de classement figurent deux émissions de télé-réalité de M6.
 

Enfin, sur AB3, les résultats sont éclectiques : des films côtoient des émissions sur des faits divers, ou des magazines de société, souvent empruntés à TF1.
Sur cette chaîne, les dix meilleures audiences de l'année dépassent largement les 120.000 spectateurs, ce qui n'est le cas ni de Plug, ni de La Trois.
 
Tout ceci posé, un regard sur l'évolution de l'audience de certaines émissions au cours de l'année pourra ne pas manquer d'intérêt, surtout en comparaison avec 2019. Nous nous y attèlerons prochainement…

Bonne année.

Frédéric ANTOINE.

 

(1) Chiffres arrêtés au 29/12/2020

(2) La comparaison avec les classements réalisés par le CIM n'est pas aisée, car cet organisme ne retient dans ses classements annuels qu'un seul Jt par chaîne, celui qui a réussi le meilleur score, alors que notre choix a été de comptabiliser tous les Jt.


22 décembre 2020

Bonne fin d'année, en tout cas pour les JT

 Actu oblige, les Jt du soir de La une et de RTL-TVI continuent à avoir le vent en poupe, et réalisent des audiences bien meilleures qu'il y a un an. Depuis les pics de novembre, les chiffres étaient plutôt en baisse, mais ils repartent à la hausse. Et la chaîne privée dame définitivement le pion à l'opérateur public.

C'était plutôt serré, côté course à l'audience, lors de la rentrée de septembre dernier. La traditionnelle domination du Jt de 19h00 sur son challenger de 19h30 avait du plomb dans l'aile, et la course à la première place semblait ouverte. Las, déjà en octobre, les résultats de La Une marquaient le coup. Depuis novembre, la messe semble être dite, et l'ordre normal des choses est revenu sur la planète Audience. RTL-TVI a retrouvé un leadership incontestable. A de très rares exceptions près, la chaîne privée rassemble toujours le plus grand nombre de spectateurs, et l'écart avec l'opérateur public redevient appréciable. Il faut que survienne un Comité de concertation Covid, dont la conférence de presse se déroule toujours à l'heure des Jt des chaînes flamandes, pour que l'audience croisse fortement, et qu'elle se retrouve souvent en plus grand nombre sur la RTBF que sur RTL. Alors que, au cours de cette fameuse conférence de presse, l'une et l'autre ne font pourtant que retransmettre les mêmes images officielles, fournies par le gouvernement…

 C'est en novembre que les audiences des deux Jt ont été les plus élevées. Sur la moyenne du mois, elles dépasssent alors les 660.000 spectateurs/jour sur La Une et les 750.000 sur la chaîne privée. L'installation d'un deuxième confinement n'est évidemment pas étranger à ces résultats, qui étaient déjà élevés en octobre sur les deux chaînes. Mais, en novembre, le Jt de la chaîne privée devient clairement beaucoup plus regardé que celui de sa concurrente. En décembre, les chiffres baissent sensiblement, tout en restant cependant toujours élevés.

Comme évoqué plus haut, la différence d'audience entre les Jt des deux chaînes est inexistante pendant une bonne partie du mois de septembre, mais un différentiel commence à se marquer avec l'arrivée de l'automne. Il ne cessera de croître au cours du mois d'octobre, et sera particulièrement élevé début novembre. A partir de la mi-novembre, l'écart entre le Jt des deux stations se stabilise.
Les occasions où le Jt de la RTBF est plus regardé que celui de RTL-TVI sont rares. En règle générale, hormis début septembre, c'est toujours le journal de la chaîne publique qui rassemble le moins de personnes. A certaines occasions, de début novembre aux environs du 20 du mois, ce déficit dépasse fréquemment les 100.000 spectateurs, voire les 150.000. En septembre, le différentiel moyen/jour de la RTBF était de moins de 20.000 personnes. Lorsqu'il atteint les près de 41.000, en octobre, la situation est toujours assez positive, car il s'agit d'un petit écart, à peine plus large que la marge d'erreur des résultats de pareil type d'enquête. Par contre, en novembre, les infos de chaîne privée accueillent en moyenne chaque jour 85.000 téléspectateurs de plus que ceux de La Une. Il n'y a plus là de discussion possible, pas plus qu'en décembre où, jusqu'au 21/12, le déficit/jour moyen est de 55.000 personnes, et il se creuse clairement en fin de période.

Une année extraordinaire

2020 restera, en terme d'audience, une année extraordinaire, notamment pour les journaux télévisés. Sur la période étudiée ici (septembre-décembre), le constat est clair : dès qu'une nouvelle info survient dans la crise sanitaire, les audiences s'envolent par rapport à la "normalité" d'une année comme 2019.

Les courbes en pointillés, qui représentent 2019, sont toujours inférieures à celles de 2020, sauf lorsqu'il ne se "passe rien", ou presque, c'est-à-dire en septembre et début octobre. Dès que la crise sanitaire redémarre, les audiences 2020 croissent, alors qu'en 2019, celles-ci étaient assez stables tout au long de la période. Même au cours de la deuxième partie de décembre, les courbes 2019 resteront plus basses, alors qu'en nombre absolu, la quantité de spectateurs est classiquement plus élevée en fin d'année qu'en début d'automne. A titre de comparaison, en 2019, l'audience moyenne/jour des Jt de la RTBF était de 415.000 en septembre, 471.000 en octobre et 507.000 en novembre. Soit près de 80.000 spectateurs de moins que cette année en septembre, 165.000 en octobre et 158.000 en novembre.

Pour les deux chaînes, le décollage par rapport à 2019 est lié à la croissance de la crise sanitaire en octobre et novembre. En décembre, le Jt RTBF conserve cette année une audience supérieure à celle de 2019. Sur RTL-TVI, la configuration est moins claire, sauf en fin de période analysée, où les chiffres 2020 repartent à la hausse.
 
Tous gagnants

Cette variation d'audience entre les deux stations est-elle de nature différente? Au premier regard, il semble que les gains sont constants : il n'y a pas de jour pour la RTBF où l'audience 2020 soit plus faible que celle de 2019, et les cas où RTL-TVI se trouve dans cette situation correspondent essentiellement à ses faiblesses de septembre. A certains moments, ces gains sont même importants (plus de 250 à 300.000 personnes). Mais il semble que, de manière générale, ils ne sont pas d'importance égale, ni situés aux mêmes moments.
Toutefois, si l'on étudie le volume d'audience gagné par les deux opérateurs, tout change. Et c'est sans doute-là une des révélations les plus intéressantes de l'analyse. En fait, les gains d'audience des Jt des deux chaînes entre 2019 et 2020 sont quasiment similaires. Le graphique ci-dessous a été réalisé à une échelle plus précise que les précédents, pour bien souligner les différences. Il démontre que non seulement les tendances de gains d'audience affichent des courbes à tendance tout à fait identique, mais que la quantité de spectateurs acquise par les deux chaînes est à peu près équivalente depuis mi-octobre. Auparavant, les gains de la RTBF était clairement supérieurs à ceux de RTL-TVI. Quand l'émission d'info de la chaîne privée dépasse en audience celle de la station publique, les deux courbes s'inversent mais restent très proches. Et ce même aux moments où, en chiffres absolus, l'audience du RTL 19h était beaucoup plus haute que celle du 19h30.
Ainsi, tout le monde est donc un peu gagnant. Un beau cadeau pour la Noël…

Frédéric ANTOINE

21 décembre 2020

La Une: des portraits des "reines des Belges", ou un documentaire Canada Dry?


La Une vient de consacrer deux soirées aux reines des Belges. Sous prétexte de narrer leur histoire de manière légèrement badine et convenue, ne s'agissait-il pas surtout de mettre les souveraines en opposition avec l'évolution de la femme belge et les mouvements féministes ?

Tout documentaire est une œuvre de création dont l'auteur peut revendiquer de ne pas vouloir porter un regard neutre sur son sujet mais, au contraire, de choisir de l'appréhender selon sa propre perception, quitte au besoin à quelque peu plier le réel pour qu'il s'adapte à la cause que l'on défend.  

Les reines des Belges, ou comme on l'aura lu à de nombreuses reprises sur Audio "les reines des belges" avec un petit b minuscule, n'échappe pas à la règle. Sauf que ce double documentaire s'inscrit sur La Une dans une case "histoire" où l'on s'attend plutôt à passer un bon moment "le temps d'une histoire", comme l'annonce le titre de l'émission, et non assister à un plaidoyer engagé porteur d'un regard politique particulier sur la réalité montrée.

Quand on traite des reines ou des princesses (le documentaire se plaît à mêler les deux situations dès ses premières images et se clôture de la même façon), la promesse de ce type de récit est plutôt convenue. Surtout si, parmi les "grands" analystes convoqués pour donner sens au commentaire, la production choisit de donner la parole à Stéphane Bern, au prince Michel de Grèce, ou à Marc Deriez, rédacteur en chef de Paris-Match (Belgique) (1). Surtout aussi si la narration, tout en apparente bienveillance, regorge de formules toutes-faites qui caractérisent ce type de genre télévisuel. 

Alors voilà, si elle n'est pas neuve, la démarche proposée ici est toutefois plutôt originale.

Un procès

Les reines des Belges est un documentaire Canada Dry. C'est-à-dire, comme l'affirmait dans les années 1970 la célèbre pub pour cette limonade, qu'il a le goût et la couleur d'un film historique sur les actrices de la monarchie belge, mais que, en fin de compte, ce n'est pas un produit de ce type. Ainsi que l'affirmait une autre pub de la même époque, celle-là produite par William Saurin, ici "l'important, c'est ce qu'il a y a dans la boîte". Et pas l'emballage. Alors que ce dernier laisse croire que le but de cette production est benoîtement de retracer des parcours de ces femmes ou de raconter des vies, ce double film entend, en fait, porter sur les personnages retenus un regard particulier, les soumettre à analyse. Et, en définitive, les mettre en quelque sorte en accusation. Ce documentaire, c'est un peu le procès des reines des Belges.

Que l'angle du regard, mais surtout l'intention finale des auteurs, aient déjà été affirmés et revendiqués dès l'intitulé de l'œuvre, ou qu'ils y aient transparu à partir des premières images, le spectateur et la spectatrice auraient su à quoi s'en tenir. Des titres du type : Les reines des Belges et le féminisme : des histoires parallèles, Les reines des Belges, des anti-féministes, Les combats des femmes belges : pas une affaire de reines ou Luttes des femmes: les reines des Belges aux abonnés absents, par exemple, auraient eu le mérite de la clarté (2). Le lénifiant Les Reines des Belges en est loin. Or, c'est réellement à cela que s'emploie ce documentaire : démontrer le décalage entre les existences des souveraines et l'évolution de la condition féminine en Belgique. Un choix éditorial est particulièrement présent dans le deuxième volet du documentaire, où l'histoire du féminisme belge est souvent évoquée en filigrane (ou contre-point) de celle des reines (3).   

Des témoins engagés

Le choix de certaines des personnalités convoquées par les auteurs pour témoigner ou analyser est indicatif à ce propos, notamment dans le chef d'une ex-présidente du Conseil national des femmes, qui n'intervient pas en tant que spécialiste des monarchies ou de l'histoire des princesses concernées, mais en raison de la lecture engagée qu'elle développe sur l'état de la société belge et sur la place qui y fut (ou non) accordée aux femmes. Dans une moindre mesure, la même remarque pourrait porter sur les choix de professeures de l'ULB réalisés par les auteurs, celles-ci étant clairement présentées comme des historiennes, mais étant elles aussi porteuses d'une parole féminine engagée. 

Les préceptes bien connus de la critique historique reposeraient-ils sur le fait de se contenter de recueillir la parole de quelques acteurs impliqués afin de construire une vérité historique? Ou ce type de construction de l'histoire n'est-elle ici pas de mise. Il n'est ainsi par exemple par certain que tous les spécialistes de l'histoire de Belgique contemporaine présenteraient de la même façon que les spécialistes qui s' expriment dans le film la manière dont fut résolu le refus de signature par le roi Baudouin de la loi de dépénalisation de l'avortement. Ni valideraient les commentaires qui suivent dans le film le récit de cet événement et du décès du monarque. Des thèmes qui, comme d'autres également présents dans le documentaire, ne sont pas directement lié à la vie des reines de Belgique, mais concernent un monarque en particulier, ou le rapport entre la monarchie belge et la condition féminine de manière plus générale…

Alors, sont-ce bien des reines des Belges dont parlait ce double documentaire? Ou ce sujet, théoriquement glamour et séducteur, prêt à réchauffer les cœurs et à faire couler quelques larmes à la veille de Noël, n'était-il pas seulement le bel emballage d'un autre projet, porteur d'un autre discours? L'œuvre des studios LDV, coproduite par la RTBF, est toujours visionnable sur Auvio, à défaut d'y être téléchargeable. L'occasion de se faire sa propre opinion…

Frédéric ANTOINE

 

 

(1) Marc Deriez qui, à chacune de ses apparitions dans le documentaire, assurera un beau placement de produit à son magazine dans un décor particulièrement choisi à ce propos.

(2) Le lecteur excusera j'espère des formules un peu rapides. Un aréopage de créatifs n'a pas planché pendant plusieurs jours pour les formuler au plus juste…

(3) Tout comme, à plusieurs moments, le documentaire ne s'attache par ailleurs pas à l'histoire des reines (ce qui est son objet déclaré), mais à celle des rois eux-mêmes.

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