User-agent: Mediapartners-Google Disallow: User-agent: * Disallow: /search Allow: / Sitemap: https://millemediasdemillesabords.blogspot.com/sitemap.xml

Regard médias

Il y en a des choses à dire sur les médias en Belgique…

18 novembre 2022

Grand-Place de Bruxelles : Un sapin à dimensions variables

Quelle est la taille exacte du sapin de Raeren placé ce jeudi matin sur la Grand-Place de Bruxelles ? Ce n’est pas aux médias qu’il faut poser la question si on veut avoir la bonne réponse. En effet, ceux-ci ont, ces derniers jours, communiqué des hauteurs variant de 18 à 40 mètres de haut.


Côté « sapin géant », on retrouve La Libre, Sud Info ou RTL Info qui attribuent à l’arbre une hauteur de « une quarantaine de mètres ». À l’opposé, les 18m sont évoqués par la VRT, L’Avenir ou Le Soir. Entre les deux, le JT de la RTBF titrait hier soir sur un arbre de 20m.Tout comme VEDIA. Ce matin, l’envoyé spécial de LN24 sur la Grand-Place parlait de « plus de 20m », alors que son collègue en studio affirmait que le sapin avait été « déraciné » dans un jardin… Avec tout cela, débrouillez-vous pour trier le vrai du faux.


À BONNES SOURCES

En fait, tout est question de source. Les médias qui imaginent un sapin géant recopient simplement un communiqué Belga, sans se poser de question à son propos. Ceux qui tournent autour des 20m. s’inspirent d’un communiqué de la ville de Bruxelles, diffusé aux environs du 11 novembre. Sur place à Raeren le 16/11, L’Avenir évoquait alors une hauteur estimée de 18 à 20m. Et sur place aussi à Bruxelles le lendemain, le journal se fixait sur 18m. Ce qui semble le plus logique. 


UN SIMPLE BON SENS

Faut-il être journaliste pour se rendre compte de l’impossibilité quasi complète d’avoir dans son jardin un sapin de 40m. de haut ? Selon les normes de construction actuelles, cela représenterait un immeuble de 15 étages. Difficile à imaginer à côté d’une villa.
Déjà avec sa hauteur réelle, le nouveau propriétaire de la demeure s’est dépêché de faire scier cet arbre pour éviter qu’il tombe sur sa maison en cas de tempête. Alors, avec 40m., on n’imagine même pas.
Vérifier semble difficile. Au risque de se contredire. En effet, le 11/11, reprenant le communiqué bruxellois, Sud Info écrit : « cet épicéa d’une hauteur de 20m. ». Quelques jours plus tard, pour ce média, la taille du sapin aura doublé. Un arbre qui croît aussi vite, cela vaut une citation au Guinness Book.


ET CE N’EST PAS TOUT…


On me dira que tout cela est du détail et ne remet pas en cause les fondements d’une info de qualité dont se revendiquent tous les médias. Certes, mais quand ça s’accumule, cela finit par poser problème. Ainsi, dans l’info qui nous concerne, les médias ont aussi patiné à propos de l’espèce du sapin. Il y a une grosse semaine, tout le monde parlait d’un épicéa. Depuis le 16/11, le sapin de Raeren s’est, quasiment partout, transformé en un Nordmann (sur LN 24, on parlait encore d’épicéa dans les infos du 17/11 matin). Un sapin qui mute en une semaine, c’est aussi un record… également dû à la source de l’info. Qui, sauf exception, n'est pas le journaliste qui a rédigé l’article.
Qu’il est bon de s’appuyer sur des sources. Quand elles sont fiables. Et qu’on peut les recouper. Même quand l’info provient d’une agence de presse…

Frédéric ANTOINE.

(cet article court a d'abord été publié sur le facebook millemedias express https://www.facebook.com/Millemedias)

16 novembre 2022

Mondial : le Palais ne botte pas en touche


Le Palais a-t-il clairement choisi de ne pas boycotter la Coupe du Monde au Qatar ? Cela pourrait être la conclusion à tirer de cette vidéo unique en son genre où il apparaît que, plus supporter des Diables que le roi Philippe à l'occasion de leur participation au Mondial qatari, tu meurs.
 
Que ce soit un super coup de comm, du jamais vu, une inscription des pas médiatiques de notre souverain dans ceux de la reine d'Angleterre, personne n'en disconviendra. On est loin des discours de Noël ou du 21 juillet, des "Mesdames et Messieurs" du roi Philippe ou des "Mesdames et Messieurs, chers compatriotes" de son père. 
Voilà un souverain qui a (enfin) franchi le Rubicon de la retenue et de la timidité, se permettant, un peu pince sans rire, des allures d'acteur. À la place des interventions officielles sur des médias qui le sont tout autant, voici une vidéo, léchée dans sa réalisation, clairement destinée à faire le buzz sur internet et les réseaux sociaux. 
 
Et cela fait mouche. Outre le tintamarre médiatique qu'elle soulève, elle a déjà recueilli en 18 heures plus de 22.000 vues sur YouTube. En comparaison, le discours de Noël 2021 du roi Philippe ne compte à ce jour que 6.700 vues, et le fameux discours du roi Albert du 21 juillet 2011, où il critiquait l'attitude de la classe politique après 400 jours de crise n'a jamais totalisé "que" 26.000 vues. Bref, ce clip diabolico-royal est une belle opération.
 
CHOIX POLITIQUE, OU CIVIQUE ? 
 
Mais fallait-il vraiment faire maintenant, et à cette occasion, cette opération médiatique ? Alors que le Palais cultive d'ordinaire la retenue, et ne s'engage (s'il s'engage…) que lorsqu'un sujet ou une opinion est unanimement partagé dans la population, comment apprécier la participation royale à ce clip présenté comme les "Derniers ajustements avant le départ pour la Coupe du monde: It’s #DEVILTIME! 😈 🇧🇪" ?
 
Une partie de la réponse est simple : l'attitude du Palais a, vraisemblablement, reçu l'assentiment du gouvernement, qui a de son côté décidé d'envoyer la ministre des Affaires étrangères au Qatar "pour supporter les Diables". Déléguer dans cet  État controversé une des personnalités les plus haut placées de la hiérarchie ministérielle démontre que la Vivaldi n'a pas choisi de boycotter le pays où se déroule la compétition. Dès lors, pourquoi empêcherait-elle le roi de prendre le même parti : non seulement être, dans l'absolu, un supporter de l'équipe nationale, mais l'encourager lors de sa participation à ce tournoi, même si cette épreuve fait l'objet de contestations de la part d'une partie de la population ?
 
SUJET CLIVANT ?
 
À notre connaissance, il n'existe pas de sondage récent permettant d'identifier l'opinion des Belges face à cette Coupe, et à la nécessité (ou non) de la contester de l'une ou l'autre manière. Un sondage a bien été mené en septembre par Amnesty International, mais il se centrait sur des thèmes connexes, sans qu'on puisse en déduire clairement une opinion de la population sur la compétition. Il indiquait en tout cas qu'une grande majorité de Belges voudrait que la FIFA indemnise les travailleurs du Qatar et souhaiterait que l'Union belge s'exprime à propos des droits humains dans ce pays. 54% des sondés se disaient aussi susceptibles de regarder au moins un match.

Ce dernier pourcentage signifie en creux qu'une partie de la population ne comptait pas suivre un seul événement du tournoi qatari. On sait que de nombreuses localités n'organiseront pas de retransmission publique de la compétition. On a aussi appris ce 16 novembre que l'Union belge annulait son fan village prévu à Vilvorde, suite au manque d'intérêt des supporters… Alors que, d'ordinaire, le Mondial enflamme tous les cœurs, cette Coupe divise visiblement la population. Assurément pas en deux parties égales, les silencieux étant sans doute nombreux à pencher pour le camp du "comme d'habitude". Mais faut-il pour autant faire fi de cette autre partie, dont on ne sait si elle est majoritaire ou minoritaire, qui a décidé de se passer de Mondial au nom de son éthique ou ses convictions ?
 
LE ROI DES BELGES
 
D'ordinaire, les Diables constituent une cause nationale. Un élément unificateur dans un pays émietté, comme le montre adroitement cette actuelle pub tv qui vise, sans le dire, à promouvoir des paris sportifs. Une équipe nationale, c'est du pain béni pour la monarchie d'un pays fédéral. D'où, sans doute aussi, l'engagement royal pour le foot. Tout le foot. Pourvu que les Diables en soient. Le foot, où qu'il se déroule, s'il permet à la Belgique de retrouver, ne serait-ce que pour un temps, une unité noir-jaune-rouge. 
 
Le contenu de la vidéo montre un choix du Palais sans nuance. On pourrait le qualifier d'unilatéral. Au nom de l'unité nationale, et du respect de tous les points de vue, n'aurait-il pas été possible d'être plus diplomate ? De distinguer un engagement derrière une équipe de la compétition discutée à laquelle ils vont participer ? 
Sil eût été difficile que le souverain s'exprime dans le clip à propos des craintes concernant le respect des droits humains au Qatar (ce qui reste à voir), n'aurait-il pas été possible de glisser quelque chose à ce sujet dans le final de la vidéo, qui se contente de montrer, symboliquement unies, les armoiries de l'Union belge (…de foot) et de la Monarchie. 
Il est tard, mais il n'est pas trop tard. Une parole royale permettrait encore de dissiper d'éventuels doutes. Une prise de position lors d'un événement, quelques mots via un communiqué… Ou une autre vidéo sur YouTube ?
Notre footeux souverain redeviendrait alors vraiment le roi de tous les Belges.

Frédéric ANTOINE
(illu : capture d'écran YouTube)
 

 

14 novembre 2022

La sauce Star Academy 2022 commence à prendre


À
l'instar de la France, les Prime de la Star Academy réalisent de belles audiences en Belgique. Mais les quotidiennes attirent aussi pas mal de monde. Pour les qualités artistiques des candidats ? Ou parce que les hôtes du château sont de superbes exemples d'une génération d'adultes qui ne sont encore que des ados…

Chose exceptionnelle, le 15 octobre dernier, en francophone belge, le premier Prime de la Star Academy a fait mieux que les JT de RTL TVI et de la RTBF, qui sont d'ordinaire en tête du classement des audiences journalières (J+1) dans notre petite communauté linguistique. Certes, ce jour-là, le nombre de spectateurs des JT ne cassait pas la baraque, mais ils ont été ensuite été un grand nombre à suivre toute la soirée d'ouverture de cette télé-réalité qui s'est terminée par le départ des candidats vers le fameux château puis, dans une autre émission, par leur arrivée sur les lieux.

 Depuis lors, les Prime de la Star Academy constituent, chaque samedi, la troisième audience du samedi en Belgique francophone, derrière celles des JT. Ce qui signifie qu'il y a plus de téléspectateurs belges francophones devant ce "télé-crochet" français, flagship de l'ogre TF1, que devant n'importe quel autre programme proposé ces soirs-là. 
Les premières semaines, les décalages avec l'audience du premier Prime ont été importants. Le 5/11, il frisait les 100.000 téléspectateurs. Mais, depuis lors, la sauce commence à bien prendre, et les audiences des Prime croissent de semaine en semaine. Celle où les candidats étaient éliminés en duo a attiré plus d'audience que les précédentes. Mais c'est samedi dernier qu'ont été battus tous les records. Même si, avec près de 350.000 spectateurs, on était encore loin des 420.000 de l'émission d'ouverture. 
La courbe des Prime continuera-t-elle à croître jusqu'à la finale ? Sans doute, si l'attachement de l'audience aux candidats se précise encore davantage.

TOUS LES JOURS, PAR LE TROU DE LA SERRURE

Il ne faut en effet pas perdre de vue que, indépendamment des Prime, la Star Academy est aussi une émission quotidienne, diffusée en premier rideau d'access primetime (sauf le dimanche), accompagnée d'un bon paquet de pubs, dont une part réservée au public belge. Un programme monté sur base des séquences de la vie du château captées, comme au bon vieux temps de la télé-réalité de première génération, par une grosse batterie de caméras placées dans toutes les pièces et saisissant les faits, gestes et paroles des candidats 22H/24 comme le précisaient les règles du CSA français (devenu depuis l'ARCOM). Des caméras dont les captations sont mixées en direct afin que les séquences qui en proviennent possèdent quasiment la même dynamique que celle d'une réalisation plateau. 
 
Ces quotidiennes ne réalisent pas les scores des Prime, mais réunissent tous les jours au moins 140.000 personnes en Belgique, ce chiffre dépassant certains jours les 200.000 téléspectateurs. Score n°1 à ce jour : celui du 3 novembre (225.000).

DES ÊTRES-PORCELAINE
 
La quotidienne montre bien sûr toutes les séances d'apprentissage et d'exercices en tout genre auxquels sont soumis les apprenti(e)s chanteurs/euses, ou des moments "chauds" de la vie sur place : lorsque des vedettes de la chanson française viennent leur dire bonjour ; lorsque monsieur le directeur annonce les épreuves à passer à l'évaluation du mardi; ou quand il révèle les noms des nommés qui risqueront de passer à la trappe à la fin du Prime
 
Mais, au gré des intentions de la prod et des choix des réalisateurs, les quotidiennes révèlent aussi, sinon surtout, la "vraie" (fausse) vie des résident(e)s du château, du lever au coucher. Comme dans le modèle historique de la télé-réalité. De quoi laisser découvrir qui sont, ou ne sont potentiellement pas, ces jeunes adultes âgées de 18 à 28 ans. Des adultes qui semblent tous, malgré leur âge, d'abord être des adolescents en proie au doute, cherchant encore leur identité. Et que l'on imagine mal engagés dans une vie professionnelle, en couple avec des enfants, ou confrontés aux aléas de la vie quotidienne.
Des êtres-porcelaine, immensément fragiles, aux sentiments à fleur de peau. Et sur qui toute critique trop directe entraîne un effondrement quasi complet. La prof d'expression scénique s'en souviendra longtemps, elle qui, ayant été claire et directe face à la prestation nullissime en Prime d'un candidat jemenfoutiste, a dû deux jours plus tard venir s'excuser devant (et bien sûr devant les caméras)  pour l'avoir traité de la sorte. L'évaluation faite par cette prof lui avait immédiatement valu d'être descendue en flèche sur les réseaux sociaux, certains allant jusqu'à réclamer à TF1 sa démission, ou à annoncer des dépôts de plaintes au CSA (devenu l'ARCOM) !
 
TOUT LE MONDE IL EST BEAU…

Contrairement aux premières Starac, l'édition 2022 est en permanence sur la sellette des réseaux sociaux où un public jeune, voire très jeune, qui s'identifie parfaitement à des candidats subtilement castés, considère qu'il est le seul juge de la qualité de ses actes, et ne tolère pas d'être remis en cause par un tiers, qui plus est si celui-ci est un professeur. 
La Star Academy 2022 a ainsi des airs de The Voice, où, tout le monde il est beau et gentil, ce "télé-crochet" ayant en son temps été créé pour adoucir le côté alors trop critique (c'est-à-dire de nature professionnelle) des évaluations de la Starac. Cette fois, pas de risque ! Les avis donnés par les profs lors des Prime sont ainsi tous plus positifs les uns que les autres, au point d'inspirer des larmes d'émotion à certains évaluateurs. Pas tout à fait le genre des évaluations de certains jurés de Danse avec les stars, comme Chris Marker…

Pour la Belgique, les données en notre possession (publiquement accessibles par quiconque) ne permettent pas de déterminer l'identité socio-démographique du public de la quotidienne de l'émission. En France, TF1 a annoncé des chiffres records. Par exemple, pour la troisième semaine, 38% de parts d'audience auprès des 15-34 ans, et 42% chez les 25-34 ans. Mais les PDA ne prennent en compte que celles et ceux qui regardent la télé, et ne donnent pas leur nombre absolu. Raté pour savoir si l'émission a fait un ras de marée chez les jeunes adultes… 
Chez nous, saura-t-on un jour quelle proportion des 174.000 téléspectateurs de la quotidienne (chiffre moyen jusqu'au 11/11) est constituée de jeunes ayant délaissé les réseaux sociaux et les plateformes pour retourner vers le petit écran ?

Frédéric ANTOINE.
 

11 novembre 2022

Mort d'un policier : quand la grande actu tombe dans l'ombre de la nuit


Pas simple de gérer une info quand elle tombe dans la soirée. Le meurtre d'un policier bruxellois, jeudi 10 dans la soirée, démontre que la réactivité des médias n'a pas été au top.

Aux environs de 19h15, rue d'Aerschot, un jeune policier est frappé de plusieurs coups de couteau et décède. Son collègue est grièvement blessé. Dans l'impossibilité de trouver l'heure exacte où la nouvelle est communiquée par Belga (sans abonnement payant, ce n'est pas simple…), on peut estimer que l'info est arrivée dans les médias vers 19h50. Le JT de La Une est alors diffusé en direct. Malgré l'importance de l'événement, il n'y sera jamais fait allusion à cette info au cours des 15 minutes qui s'écoulent entre 19h50 et 20h35. Et il n'y aura pas d'émission spéciale par la suite sur le sujet. Sur RTL TVI, le journal était terminé, mais il n'y aura pas là non plus d'émission sur l'événement. Les soirées des deux chaînes se dérouleront normalement, comme si de rien n'était. Sans mort de policier.

Plus étonnant, il en est de même sur LN24, supposée être sur l'événement en direct tout au long de la journée. Mais pas de 20 à 22h, où la station diffuse des documentaires. Là aussi aucun bandeau ne défilera en bas de l'écran (pour donner cette info, ou d'autres). Il faut attendre 22h pour que la journaliste présentant un JT qui sera ensuite rediffusé, donne l'info face caméra très succinctement. Pas d'envoyé sur place, par d'images, de reportage, d'interview. Rien que une photo qui sera celle utilisée par presque tous les médias du monde qui traiteront de l'événement (et qui ne montre rien de très précis).  RTBF et RTL TVI n'ont pas encore trop à craindre de leur concurrence apparentée au groupe IPM… Ce soir-là, l'info tv n'était pas au rendez-vous.

PRENDRE SON TEMPS

Et les médias "classiques" ? Sur le smartphone à notre disposition, la première alerte provient de Sud Info à 19h55, rapidement suivie par celle du Soir (= les 2 médias de Rossel). L'alerte suivante tombe sur notre smartphone 20 minutes plus tard, en provenance de RTL Info. Il faut attendre un peu moins de 40 minutes pour qu'une alerte arrive de La Libre, puis de 7/7.be. L'alerte de L'Avenir arrivera plus de 40 minutes après celle de Sud Info, et celle de la RTBF un peu moins de 50 minutes, comme celle de La DH. Il semblerait y avoir comme du retard dans l'air…

CONFIRMATIONS…

Lors d'une précédente chronique sur ce blog, ce type de relevé des heures de réception des alertes sur un smartphone avait été discuté par un lecteur. Nous le complétons donc ici par un relevé de l'heure affichée en tête de l'article publié sur l'appli du médias, et auquel l'alerte renvoie directement.

Les résultats sont légèrement différents, mais confirment tous que, en soirée, la réactivité des médias devant une actu de ce genre n'est pas parfaite.

Comme pour les alertes, les médias du groupe Rossel sont les plus rapides à publier un article sur le sujet (Le Soir ne fera qu'une brève avant d'être plus précis 30 minutes plus tard). Il y a quasi similarité entre l'article et l'alerte. A La Libre, l'article est écrit vers 20h30 (soit 33 minutes plus tard que la brève du Soir), avant que l'alerte ne nous soit transmise. Idem chez 7/7, qui publie près de 35 minutes plus tard que Sud Info. L'Avenir fait paraître son texte 2 minutes avant que nous recevions son alerte, soit près de 3/4 d'heure après Sud Info. La RTBF publiera son texte et son alerte en même temps, à plus de 50 minutes du premier. Pour RTL Info, il semble y avoir un illogisme entre l'heure de l'alerte (20h25) et le l'heure notifiée en tête d'article (20h39). Il faut préciser que l'heure retenue ici est celle explicitement indiquée comme étant cette de la première publication, et pas celle des mises à jour. Et que, sauf erreur de réception, LN24 n'a envoyé aucune alerte à propos de cette info. A 20h11, son alerte concernait le "Doc en prime" diffusé à l'antenne, dont le titre correspondait assez à l'actu du moment: "Demain, serons-nous tous myopes"…

Face à cet événement, certains médias se sont vraiment montrés très prudents avant de le rendre public. Précaution extrême de mise ? A moins que, simplement, tous n'aient pas eu les mêmes moyens, une veille de 11 novembre à 20h, pour traiter une actu chaude ?

Frédéric ANTOINE.



08 novembre 2022

L'amour n'est plus dans le pré


La quatorzième saison de L'amour est dans le pré, sur RTL TVI, sera-t-elle la dernière ? Tout montre que, sur le marché belge, la formule arrive à bout de souffle, tant côté des fermiers que de leurs prétendants.  Et, en partie, de l'audience.

L'audience 2022 de L'amour est dans le pré (AEDP) n'est pas terrible. Le volume de l'auditoire J+1 (les gens qui regardent en direct, ou en léger différé) est à peu près identique depuis le début de la diffusion. Il n'a décollé que tout récemment, lors du premier épisode de sélection finale de la prétendante. Si on ajoute ceux qui regardent jusqu'à J+7, les chiffres sont meilleurs, et moins plats.

Ces audiences 2022 sont aussi clairement  inférieures à celles des années précédentes. Que ce soit l'édition 2021, qui avait été différente des versions précédentes parce que plus courte, sans présence de Sandrine Dans, et recourant beaucoup aux voix, notamment.
Ou que ce soit celle de 2019, dernière année “normale” avec une formule traditionnelle, ± identique à celle de cette année 2022. Et ce même en J+7.

De quoi cet affaiblissement de l'audience est-il un indice ? Tentative d'analyse.

UN RÊVE DE TV  MÉDIATRICE

Elle était belle, l'ambition originelle de L'amour est dans le pré (AEDLP). Servir d'agence matrimoniale médiatique à des agriculteurs solitaires éloignés de tout cœur à prendre, n'était-ce pas là un superbe rôle pour la télévision ? Bien sûr, le programme s'immisçait dans la vie des candidats et de leurs prétendant(e)s, montrant de semaine en semaine leurs relations et sentiments, comme il se doit dans une émission de télé-réalité. Bien sûr, chaque épisode était précédé, suivi et entrecoupé de bon nombre d'écrans de pub bien remplis et chers vendus, comme cela se doit dans l'univers de la télévision privée. Mais ce programme-là revendiquait d'apporter autre chose qu'un simple spectacle et un étalage de monstration de sentiments. Il disait vouloir servir à quelque chose. Avoir une utilité. Et, qui plus est, sociale, humaine. C'est-à-dire, par exemple, sans aucun rapport avec “l'utilité" du filmage 22h/24h des candidats de la Star Academy.

Avec l'AEDLP, la télévision rentrait parfaitement dans une des configurations définies dès les années 90 (soit avant l'arrivée de la télé-réalité) par la sociologue Dominique Mehl, qui parlait déjà à l'époque de la "télé médiatrice" (1).

TROP PETIT POUR L'HEXAGONE ?

La télé-réalité aime se parer de justifications sociétales, et ici c'était plutôt réussi. Perdus au fin fond d'immenses terres campagnardes isolées de tout, vivant presque comme il y a un siècle, de pauvres célibataires endurcis par la vie des champs pouvaient ainsi rêver de trouver l'âme sœur. Et, parfois, ça marchait. 

À l'échelon de la France, pareil concept avait tout son sens, tant les zones agricoles sont dans des déserts démunis de tout.  À commencer par des occasions de rencontrer d'éventuel(les) compagnes et compagnons ailleurs qu'à un diner sanglier après une chasse, à une après-midi loto à la salle des fêtes ou lors du bal du village, toujours aussi musette en 2022 qu'en 1922.

Ayant fait un tabac en France, le concept passe la frontière, et devient tout aussi populaire en Wallonie. Les premières audiences de la version belge de l'AEDP cassent la baraque et le public urbain, médusé, découvre qu'il y a véritablement une crise de la solitude au sein d'un monde agricole déboussolé, où l'on ne cesse de travailler dur, tout en reconnaissant que, sans les aides de l'Europe, la survie aurait déjà été impossible. L'AEDP devient la face visible de l'iceberg d'un monde que l'essentiel de la population ignore d'autant plus que, aujourd'hui, le monde agricole ne représente plus qu'une dizaine de pour-cent de la population belge.

UN FORMAT EN ÉVOLUTION

Petit à petit, l'émission élargira le spectre de sa "clientèle” de cœurs perdus. Pardi, finalement, les vieux garçons perdus dans des fermes délabrées, il n'y en a pas légion. On découvre alors que le monde agricole est multifacette, et que les clichés qu'on peut avoir à son égard doivent être plus que nuancés. Au fil des années, les profils des célibataires s'élargiront à l'ensemble de l'univers lié à l'agriculture, voire même (fort) au-delà. La définition du “célibataire” évoluera elle aussi, ceux qui seront castés et retenus s'éloignant de plus en plus du profil de l'endurci. Deux ou trois dizaines de mois de solitude suffiront parfois pour répondre au critère et être pris dans l'émission. Dans un monde où tout va vite et où règne l'immédiateté, les mois ne durent-ils pas autant que des années. Alors, dans ces cas-là, faire "appel à l'équipe" (c'est-à-dire à la prod de RTL TVI) ne paraît pas illogique.

Mais, avec ces adaptations, la formule s'érode peu à peu. La quatorzième édition, qui se terminera avant la fin novembre, constitue une illustration parfaite des désagrégations successives d'un concept en définitive peut-être devenu trop difficile à exploiter correctement sur un petit territoire de 4 millions d'habitants, où il n'y a plus que 22.000 personnes qui travaillent régulièrement à la ferme, ce nombre étant encore plus réduit dans les exploitations de type familial (± 13.600 hommes et 6.200 femmes) (2).

DÉSAGRÉGATIONS

Cette difficulté de recrutement se retrouve du côté des célibataires (± endurcis, donc), qui ont envoyé leur candidature à RTL TVI et ont été retenus par la production (en tout cas est-ce comme cela qu'ils sont présentés). 

Parmi ceux-ci, deux candidates, mère et fille. Et ne sont pas directement liées au monde agricole puisqu'elles animent et dirigent… un manège. Certes, il s'agit toujours d'animaux, mais n'est-on pas là très borderline ?
Autre candidat à la frontière du genre : un jeune patron d'entreprise d'élevage de poussins, plus proche du monde entrepreneurial que de celui de l'exploitation agricole.
On se demandera aussi pourquoi la production a sélectionné dans son échantillon un jeune agriculteur de 22 ans, plutôt séduisant, qui passe toutes ses fins de semaine à s'amuser dans les fêtes que des membres de la FJA (Fédération des Jeunes Agriculteurs) semblent organiser aux quatre coins de Wallonie. À cet âge et dans ce contexte, la médiation de l'appareil télévisuel était-elle vraiment nécessaire pour sauver ce jeune homme d'un célibat qui ne devait avoir duré que quelques mois?…
 
Même si les autres candidats sont, eux, les bottes bien ancrées dans les terres agricoles, cette diversité de casting écarte le téléspectateur du cœur de cible. Bien d'autres préoccupations que celles de la ferme se mettent en effet à occuper (voire brouiller) l'écran.

COMME NEIGE AU SOLEIL
 
Tout cela ne serait pas trop grave si cet éparpillement du casting avait été sans conséquence. Or, au fil du programme, le nombre de candidat(e)s a fondu comme neige au soleil, une partie de ces “agriculteurs atypiques” rendant les armes dès le début de « l'aventure », ou presque. 
 
Cherchant à encourager la diversité, le casting comprenait un agriculteur issu à la deuxième génération d'une famille immigrée. Il se désistera avant même l'étape de la réception des courriers envoyés par les prétendants. 
 
Au manège, la candidate la moins âgée déclarera forfait avant l'arrivée des prétendants qu'elle avait sélectionnés.

Quant au jeune agriculteur de 22 ans, au moment de faire un  choix définitif entre ses prétendantes, il déclarera n'avoir rien ressenti ni pour l'une ni pour l'autre, et les renverra donc toutes les deux chez elle sans autre forme de procès. Il sera tout de même forcé d'avouer que, en fait, il en pinçait pour une autre, qui n'était pas venue aux speed dat, mais… qu'il connaissait déjà auparavant.
 
LA GRANDE (PETITE) FAMILLE AGRICOLE 

La deuxième perversion qui gangrène l'AEDLP est ainsi liée à l'étroitesse du monde agricole. Si le jeune éleveur de moutons ans de 22  rêvait d'une jeune femme qu'il connaissait déjà, plusieurs de ses prétendantes l'avaient aussi rencontré auparavant lors des soirées de la FJA. 
 
Le fait n'est pas propre à cette édition-ci de l'AEDLP, mais plusieurs candidats se connaissaient visiblement avant l'émission, et certains avaient incité d'autres à candidater. Il en est de même du côté des prétendant(e)s. Plusieurs sont issu(e)s du monde agricole et se connaissent. 
Des liens familiaux existent entre certaines prétendantes. La femme qui sera retenue par un des agriculteurs avait déjà fait l'émission l'année dernière, et était restée en couple plusieurs mois avec celui qui l'avait choisie à l'époque. 
Au moment du départ de la personne qu'il n'avait pas retenue, un agriculteur n'hésitera pas à lui dire "Et bien le bonjour chez toi"… 
Autant de liens et de sous-entendus qui annihilent l'impression de naturel, de légèreté et de surprise auquel le spectateur croit s'attendre. Finalement, les jeux ne sont-ils pas un peu pipés ?
 
AU SPECTACLE

Enfin, l'émission semble attirer moins de prétendant(e)s que par le passé. Les candidat(e)s séduisent-ils moins? En tout cas, les prétendant(e)s paraissent moins nombreux à envoyer le fameux courrier avenue Georgin. D'où des sélections parfois difficiles (plus de personnes = plus de choix diversifiés), et dans certains cas un nombre très limité de prétendant(e)s retenus. 
Cette année, des personnes ont même été conviées à Bruxelles à un “visionnage collectif”, au Food Market de la gare maritime de Bruxelles, le 18 avril, afin de les inciter à poser leur candidature. Une démarche différente de celle de l'envoi spontané d'une lettre d'amour à la production…

Regardant l'AEDLP, le spectateur peut par moment se dire : "Tout ça pour ça !". En fait, oui. Parce que, finalement, cette émission est aussi, sinon d'abord, un spectacle. Tant pis si les personnages se connaissent déjà ou si les longues séquences des séjours à la ferme n'aboutissent à rien, l'essentiel est dans le récit, les sentiments qu'il inspire et les sensations qu'il procure au téléspectateur. Et dans les personnages. Si ceux-ci sont typiques, tant mieux. L'émission terminée, on s'interrogera toujours sur certains des choix faits par les célibataires. Clairement, ils n'ont pas tous été faits dans l'espoir de se lancer avec lui (ou elle) dans une nouvelle vie. Mais dans le but de donner du show, de l'exotique, de l'original. 
Permettre à des personnes du monde agricole de se sentir moins seul(e)s, est-ce vraiment encore au programme ?

Frédéric Antoine
---

(1) Dominique MEHL, La fenêtre et le miroir, Paris, Payot, 1992.
(2) https://etat-agriculture.wallonie.be/contents/indicatorsheets/EAW-A_I_a_2.html#

29 octobre 2022

Les JT après les années covid : pas la débâcle, mais pas la joie non plus


Depuis la fin des fortes épidémies de covid, on avait dit les gens dégoutés de l'info, et désertant en masse les rendez-vous d'actu. Par rapport à 2019, les JT rassemblent effectivement un peu moins de monde. Mais c'est loin d'être la cata.

Les oracles (et les enquêtes sociologiques [1]) l'avaient laissé croire : entre covido-sceptiques et partisans des théories du complot, convaincus que les médias étaient manipulés, et un grand public devenu allergique à l'actualité tant il en avait consommé lors des confinements, il y avait un point commun : les uns et les autres annonçaient vouloir déserter les JT et leurs flots de mauvaises nouvelles anxiogènes. Réaction épidermique ou lame de fond ? En confrontant les audiences "d'avant" et d'après" grandes épidémies de covid, il y a assez loin de la coupe aux lèvres.

PAS SI CLAIR...

Le graphique comparatif ci-dessus (2) montre évidemment l'envolée des audiences des JT de RTL-TVI et de la RTBF en 2020 (courbes grises et jaunes), ainsi que le nombre de spectateurs/jour un peu plus important en 2021 (courbes bleu clair et verte). Les résultats de 2019 et 2022 sont ici difficiles à distinguer. Regardons donc les audiences des deux années moins marquées par la crise du covid : celles "d'avant" et celle d'après".
 
QUASI-SUPERPOSITIONS
Pour le RTL Info 19h, la similitude de tendance des deux courbes apparaît clairement : en 2019 comme en 2022, les audiences croissent ou décroissent régulièrement au même rythme, les courbes allant jusqu'à se recouper. Ces similitudes démontrent que les habitudes d'usage des spectateurs sont en général les mêmes "avant" et "après" le covid : il y a des jours de la semaine où on regarde moins ce JT, et d'autres où c'est le contraire. Le presque recouvrement atteste aussi de la quasi-égalité entre le nombre de spectateurs présents en 2019 et en 2022. Ils n'ont clairement pas déserté en masse.
Pour Le 19H30 de La Une, les constatations faites à propos de RTL TVI sont également de mise : les deux courbes présentent fréquemment les mêmes tendances journalières, et les deux courbes se superposent à certains moments, mais peut-être moins fréquemment que chez le concurrent privé (en tout cas dans la partie de la courbe concernant le mois d'octobre). Apparemment, dans l'ensemble, l'audience de La Une paraît ± identiquement au rendez-vous.
 
RTL TOUJOURS DEVANT...

Rien n'a-t-il dès lors changé ? En tout cas, la domination du JT de la chaîne du groupe appartenant à DPG-Rossel (les deux lignes bleues) sur celle du boulevard Reyers (lignes oranges) paraît à peu près constante au cours des deux années. 
En comparant les audiences jour par jour, le déficit d'audience du JT de la chaîne publique est quasi permanent tant en 2019 qu'en 2022. Les rares jours où ce JT rassemble plus de spectateurs que celui de RTL sont plus nombreux en 2019 qu'en 2022.
 
LE FIFRELIN QUI TUE
Finalement, y a-t-il plus ou moins de spectateurs en 2022 qu'en 2019 ? En établissant l'audience quotidienne moyenne des deux JT sur les deux années, pendant la période analysée, les résultats paraissent à peu près équivalents. 
Mais, en y regardant de plus près, on constate que le RTL Info, qui dépassait de peu, en moyenne, les 500.000 téléspectateurs quotidiens en 2019, en rassemble désormais 487.000. Le 19H30, de son côté, passe de 450.000 à près de 439.000. 
En chiffres absolus, l'audience des rendez-vous d'info des deux chaînes est donc bien plus basse en 2022 qu'avant le covid. Mais ces variations se situent à la marge, et sont de volume à peu près identique : une perte de ± 12.500 personnes pour la RTBF, et de ± 14.000 pour RTL TVI. Soit des chiffres qui se trouvent bien à l'intérieur de la marge d'erreur de la méthode de mesure de l'audience qui, rappelons-le, est réalisée sur un échantillon de foyer dont les usages télévisuels sont extrapolés à ceux de l'ensemble de la population belge francophone. 
 
Un fifrelin qui aurait tendance à pousser à la conclusion que seule une infime partie de l'audience aurait fui les JT. Voire que leurs audiences peuvent être estimées stables. D'autant qu'il ne faut pas aussi perdre de vue celles et ceux qui regardent chaque jour le 20H de TF1, et qui sont très fréquemment plus de 100.000.


Alors, où sont donc passés les anti-JT ? (3) Ne sont-ils pas passés des paroles aux actes ? Étaient-ils en fin de compte si peu nombreux qu'ils sont passés entre les mailles de l'audimètre ? Ou n'en ont-ils en fait jamais été spectateurs ? C'est sans doute ici que se révèle une des limites des méthodes de mesure quantitatives.

Frédéric ANTOINE
---
[1] Notamment l'enquête sur les usages des médias en temps de covid que nous avions lancée au printemps 2021.
(2),Pour que la comparaison soit correcte, celle-ci a été opérée sur la même période de l'année (les mois de septembre et les 24 premiers jours d'octobre), en organisant les données selon les mêmes jours de la semaine.
(3) Dans l'enquête que nous avions menée au printemps 2021, la proportion de répondants déclarant qu'ils allaient changer leurs habitudes de consommation de l'info s'était avérée faible, mais bien présente.


20 octobre 2022

LIZZ resigns : (presque) tous sur la balle


L'annonce de la démission de la Première ministre britannique a rapidement déclenché des alertes info sur les smartphones. Mais tous les médias belges francophones n'ont pas réagi aussi rapidement…

En Grande Bretagne, la future démission de Lizz Truss semblait dans l'air bien avant cet après-midi, et les médias étaient tout matos dehors bien avant qu'elle ne sorte sur le pas de la porte du 10 Downing Street, en tout début d'après-midi (sans doute après son Last Lunch as Prime Minister).

À 01h33 PM heure de Londres, la BBC annonce que Lizz Truss est devant le pupitre, et va s'adresser aux Britanniques. La présentation de la démission a lieu à 01h34 PM, et tout est fini à 01h37 PM. L'info est si extraordinaire (jamais un chef de gouvernement de sa Gracieuse Majesté n'avait baissé les bras aussi vite) qu'elle mérite bien un "Breaking news" et une alerte sur les smartphones. La politique des médias n'est-elle pas aujourd'hui de pratiquer le "mobile first"?

LE TEMPS D'UN ŒUF À LA COQUE

Alors, qu'est-ce que cela donne? On ne peut pas être abonné aux alertes de tous les médias. L'observation qui figure ici n'est donc pas exhaustive mais comprend tous les médias francophones belges couvrant l'actu chaude en continu.

Trois minutes auront suffi à certains médias pour annoncer la nouvelle. Parmi les alertes dont nous disposons, le quotidien Libération (Paris) aura été le plus rapide, ce qui peut paraître étrange pour un média qui se veut plus "quality" que hot news.

Pour la Belgique francophone, l'alerte la plus rapide, à peine quelques secondes après Libé, est N24. La chaîne confirme ainsi qu'elle est bien une télévision qui entend sauter sur l'info, et être immédiatement sur la balle. Le Breaking news, c'est son affaire. En tout cas pour l'actu en question. Une belle promesse pour l'avenir.

Ensuite, les choses 'traînent' un peu. Si plusieurs médias français (ou du Québec) lancent leur alerte à Actu+4, en Belgique francophone, il faut attendre Actu+5 pour que des alertes tombent sur les smartphones. Et d'abord celle de la RTBF, qui démontre ainsi que, tout comme LN24, elle est elle aussi sur la balle de tous les événements.

Le Soir est à peine moins rapide, démontrant que ce n'est pas parce qu'on est un quality paper qu'on ne peut pas être prompt sur la transmission de l'info, surtout quand celle-ci est sûre et ne mérite pas divers recoupements. Les régionaux de Rossel, réunis dans Sud Info, réagissent quasiment aussi vite que Le Soir. Le quotidien de la rue Royale est ainsi plus rapide que les grands quality papers français Le Monde et Le Figaro qui se targuent souvent de ne pas faire la course à l'annonce d'un événement.

ALERTES À LA TRAÎNE

Le site 7/7.be donne la nouvelle à Actu+10, ce qui est une réaction moyenne. Tous les titres de IPM se trouvent au-delà de ce timing. Si on comprend que La Libre entretienne son image de quality paper en ne cherchant pas à être le premier à livrer l'info, il ne devrait peut-être pas en être de même de son "compère" La DH. Mais comme il semble que la gestion de tout ce qui est numérique soit assez proche entre les deux titres, Libre et DH communiquent la nouvelle à Actu+12, ce qui est tout de même assez tardif (6 minutes plus tard que Le Soir, et 9 minutes de plus que LN24, qui appartient au même groupe). 

L'Avenir, qui appartient aussi à IPM, est encore plus lent: il publie sont alerte pour téléphones à Actu+16! Une démonstration de l'intérêt très relatif qu'il porte à l'actualité internationale. Alors que tous les médias alertaient sur la démission  londonienne, L'Avenir publiait une alerte sur l'annonce du cancer d'un homme politique wallon avant d'informer sur le départ de Lizz Truss. De quoi démontrer quelles sont ses priorités.

Doit-on en dire autant de RTL Info, qui se veut normalement en ligne directe avec le hot news, mais qui a réagi à Actu+20 minutes, alors que les autres médias avaient déjà tourné la page ou se focalisaient sur l'aftermath de l'info: quels candidats au poste, Boris Johnson a-t-il des chances, etc? De quoi la tardive réaction de la rédaction de RTL est-elle le signe, alors que sa nouvelle direction déclare que l'actu est un des piliers du groupe, et le restera?

LACONIQUE OU PLUS PRÉCIS?

Bien sûr, il y a le fait de réagir, puis il y a le contenu. Car même dans une alerte smartphones, on peut en dire peu ou plus. Beaucoup se limitent à   "Royaume-Uni: La Première ministre Lizz Truss annonce sa démission", certains médias insérant tout le message dans le corps du texte (Libération, France Info, Le Figaro), et d'autres jouant sur un avant-titre en plus du titre (LN24) (1). Le Soir est dans la même tonalité minimaliste, avec une formule plus raccourcie mais tout aussi informative: "La Première ministre britannique, Lizz Truss, annonce sa démission". 

Certains entendent en dire davantage. BFM ajoute que Lizz Truss était "fragilisée", ce qui apporte une réponse au "Pourquoi" de la liste des 5W qu'on doit normalement retrouver dans une info. 

Plusieurs médias mettent l'accent sur le caractère particulier de la situation: la brièveté du règne de Lizz Truss. La RTBF dit qu'elle démissionne "après moins de deux mois". 7/7 parle de "seulement 45 jours".

On pourrait croire que, arrivées tardivement après les autres alertes, celles de La DH et de La Libre auraient été plus peaufinées, détaillées ou complètes. Ce n'est pas le cas. Elles se contentent du même contenu informationnel bref, sans y ajouter le moindre détail. Tout comme la lanterne rouge de notre classement horaire, RTL Info, qui, 20 minutes après l'événement, se contente de dire que "la Première ministre britannique Lizz Truss démissionne".

Enfin, même dans une alerte info, on peut trouver de quoi dramatiser la nouvelle. Sud Info commence ainsi son message par les mots "Crise gouvernementale au Royaume-Uni". L'anxiogène mot "crise", présent ici, ne sera pas utilisé par les autres médias. Si les alertes infos se contentent généralement du factuel, sans faire d'accroche, chez Sud Info, mettre en avant le caractère sensationnel de l'info semble inscrit dans les règles d'écriture.

Frédéric ANTOINE.

(1) D'ordinaire, l'avant-titre des alertes info donne simplement le nom du média émetteur, voire ne comprennent que la mention: "alerte info". Certains médias, comme LN24 (ou Sud Info) se contentent de donner leur identité via le cadre graphique situé à gauche de l'alerte info, et utilise l'avant-titre pour apporter un premier élément contextuel d'info ("Grande-Bretagne", pour LN24, ce qui est assez précis. "Monde", qui l'est beaucoup moins, pour Sud ìnfo) . (texte corrigé à ce propos ce 21/10 suite à une remarque faite par LN24 lors de la publication le 20 en soirée)
 

Ce que vous avez le plus lu